•  

    Soudain, elle remarqua un mouvement au fond de sa cellule. Ou plus précisément dans une cellule juxtaposée, derrière des barreaux. Dans l'obscurité, elle apercevait la forme d'autres barreaux. Une petite cage à l'intérieur-même de la cellule.

    Et une petite voix retentit.

     

    - Qui es-tu ?

     

    Lya sursauta, plus sur les nerfs que jamais.

     

    - Q-Qui vient de parler ?

    - Moi, répondit la petite voix le plus naturellement du monde.

     

    Lya fixa la petite cage, tentant de voir le plus nettement possible. Ses yeux, depuis que la porte était fermée, s'habituaient au fur et à mesure à l'obscurité partielle. Et la silhouette était vraiment étrange. Petite, à quatre pattes, la forme du corps était celle d'un chat, mais la queue tenait de celle du renard, et les oreilles, ressemblaient à celles d'un lapin, mais constamment dressées et vers l'arrière. L'animal possédait aussi une fourrure plutôt touffue. Mais elle était aussi assez petite, à peu près aussi longue qu Camo et haute d'une vingtaine de centimètres.

     

    - Tu n'as toujours pas répondu à ma question, protesta la petite créature. Qui es-tu ?

    - Je … balbutia Lya, incertaine. Je … je ne sais pas. Je ne le sais vraiment pas …

     

    L'animal pencha la tête sur le côté. Il, ou plutôt elle, ne devait pas comprendre.

     

    - Tu ne sais pas comment tu t'appelles ?

    - Si, mais c'est bien l'une des seules certitudes que j'ai en ce moment … Je m'appelle Lya. Lya Aemilia.

     

    Cela ressemblait étrangement à un interrogatoire, mais la petite voix calmait Lya. Elle se sentait moins seule. Évidemment, la terreur de ces fameux tests était toujours aussi forte, elle savait bien que cette créature ne pourrait pas la sauver, mais elle étouffait cette peur.

     

    - Et pourquoi es-tu là ?

    - Je ne sais pas, répéta Lya en frissonnant. Ils veulent me faire des tests, comme tu as dû l'entendre, mais je ne sais rien d'autre. En tout cas ils m'en veulent, ça fait des années qu'ils me cherchent. Et toi ?

    - Ils veulent mon pouvoir, cracha la petite créature. Le pouvoir de mon espèce. Et crois-moi, ils n'en ont rien à faire de me tuer pour le faire.

    - Ça, je veux bien le croire … Dis, c'est une question que je me pose depuis un moment. Tu as parlé de ton espèce, mais … qu'es-tu ?

    - Les humains appellent les nôtres netsugi1. Mais je n'ai pas de nom.

     

    Lya réfléchit un instant. Puis répliqua :

     

    - Ce serait plus facile si tu avais un nom …

    - Hein ? Bah, si tu veux, donne-m'en un … mais je ne suis pas fan des pratiques humaines. Désolée de te dire ça, mais je n'aime pas spécialement les humains.

     

    Ouch. Bon, Lya avait l'impression de se voir confier par le destin tous les asociaux qui passaient par là. Après Gira, qui avait eu du mal à accepter le concept d'amie, c'était une créature qui n'aimait pas les humains.

     

    - Je ne cherche pas à te rendre plus humaine, tu sais … mais tu connais mon nom, alors que je ne connais pas le tien, ou plutôt tu n'en as aucun par lequel je puisse t'appeler … et puis moi, je t'aime bien, tu sais !

     

    Lya ne lui dit pas que c'était elle qui lui permettait de tenir sans péter un cable.

     

    - Dis … qu'est-ce que tu penses de Kyura ? Pas trop humain, et je ne sais pas pour toi, mais moi, ça me plaît.

    - Si tu veux.

     

    Kyura, fraîchement nommée, fit semblant de ne pas s'y intéresser plus que ça, mais Lya vit bien la petite lueur dans ses yeux.

     

    - On fait un pacte ? suggéra soudain la netsugi.

    - Mmh ?

    - À la moindre occasion, on s'entraide et on s'échappe.

    - Je croyais que tu n'aimais pas les humains, la taquina Lya.

    - C'est mieux que de croupir ici jusqu'à mourir.

    - Tu as raison. Mais dans mon état, je risque de ne pas pouvoir faire grand-chose, se désola Lya en bougeant ses chaînes.

     

    Kyura ne répliqua rien, et attendit quelques minutes. Puis elle se roula en boule dans sa cage.

     

    - Il est tard, remarqua la netsugi. Tu devrais te reposer. Je ne sais pas ce que c'est que ces fameux tests, mais au cas où, être en forme peut être le meilleur moyen de survie.

     

    Lya acquiesça, et malgré sa position pour le moins inconfortable, réussit à s'endormir assez vite.

     

    Le lendemain, la jeune fille se réveilla avec des bruits de pas. Elle appela Kyura en chuchotant, laquelle bougea une oreille avant de se lever.

    Un homme pénétra dans la cellule. Lya reconnu immédiatement Suano. Puis Katsu, son sourire provoquant sur le visage, derrière le bras droit d'Ukyo. « Non … », gémit Lya dans son esprit, « Tout mais pas ce sourire … ». Enfin, un troisième homme passa la porte. Et ce qu'il portait lui arracha un cri de surprise mêlée à de la terreur. Réaction qui fit rire Katsu. Aussitôt, Lya se reprit, furieuse contre elle-même. L'agent qu'elle ne connaissait pas ressemblait à un scientifique fou, et tenait une espèce d'anneau de la taille d'une tête, relié à un fil, avait dans son autre main une seringue, et poussait une espèce de chariot avec un moniteur et tout un tas d'équipements.

    Le scientifique s'approcha d'elle, alors que la jeune magicienne était tétanisée par la peur. Il lui planta la seringue dans le bras sans lui laisser le temps de comprendre ce qui lui arrivait, pompa du sang et la retira, puis la posa sur le chariot.

    Comme réveillée par l'aiguille – il ne s'était pas gêné pour lui faire mal, elle n'aurait pas aimé l'avoir comme médecin – la jeune fille bougea à nouveau. Puis elle le vit s'approcher avec l'anneau. Lya comprit ce qu'il allait faire, et, paniquée, commença à se contorsionner dans tous les sens. Aussitôt, Katdu l'immobilisa brutalement, jouissant de la terreur de la captive. Le scientifique posa l'énorme anneau autour de la tête de Lya, qui se débattait comme elle pouvait, sans résultat. Il le brancha au moniteur, et en attendant qu'un effet apparaisse, il se mit à analyser le sang de son côté.

    Quelques secondes après l'activation de l'anneau, Lya sentit quelque chose s'introduire dans sa tête, dans son esprit. Au début, ça … chatouillait légèrement, puis l'intrusion devint de plus en plus intolérable. Elle cria, mobilisa sa magie au maximum. C'était inutile, sa magie était anéantie directement. Mais c'était instinctif. Elle avait l'impression que son esprit brûlait.

    Au bout de ce qui semblait une éternité, la douleur cessa, et le scientifique récupéra son matériel.

     

    - Positif, fit-il comme seul commentaire avant de partir.

     

    Suano lui emboîta le pas. Katsu resta quelques secondes en face de Lya, qui tentait de reprendre ses esprits. Elle haletait, épuisée par toute la magie qu'elle avait utilisée inutilement.

     

    - Tu devrais être contente, petite tête ! lança-t-il. Les résultats viennent de prolonger ton espérance de vie d'environ … un jour !

     

    Puis il sortit, ne remarquant pas l'étincelle de magie qui venait de parcourir les murs avant de s'éteindre. Lya, la vision brouillée, crut avoir mal vu. L'étincelle en question venait de Kyura ? Pourtant, la magie était inutilisable …

     

    - Repose-toi, conseilla la netsugi. Normalement, tu es en sécurité, pendant plusieurs heures.

    - Que … Quoi ? s'étonna Lya d'un air hagard.

    - Je t'expliquerai plus tard, si on sort d'ici vivantes.

     

    Lya lui obéit sans comprendre, mais elle était si épuisée que de toute façon, elle n'aurait pas pu faire autrement. Elle était terrifiée, ces tests avaient fonctionné, qu'allaient-ils lui faire, maintenant ? Elle s'endormit la peur au ventre.

     

     

    ***

     

     

    Au même moment, Gira s'adossa à un tronc, et s'appliqua à respirer lentement. Elle méditait, exerçant sa magie qui était revenue entièrement. Les effets de la méditation se firent rapidement sentir, et elle se sentit en pleine forme. La démone décida de s'entraîner pour entraîner son corps.

    Elle commença à bouger, attaquer, feinter dans le vide avec son poignard. La démone sentit son corps reprendre vie peu à peu, comme endormi par la défaite de la veille. C'était une gestuelle rapide mais magnifique à voir, une superbe danse. Une danse mortelle. Destinée à Ragnarök.

     

     

    ***

     

     

    Le lendemain, Lya se réveilla d'elle-même, moins épuisée. Kyura lui indiqua le temps qu'elle avait dormi, puis lui résuma tout ce qu'il s'était passé depuis. Elle avait entendu des voix derrière la porte, qui disaient que non, le matériel n'était pas encore prêt, mais que ça ne saurait tarder. Quant à savoir de quel matériel les gens parlaient … Lya trouvait ça lugubre et ne voulait pas imaginer.

    Quelques heures passèrent, pendant lesquelles les deux captives s'efforcèrent de parler de tout et de rien. Lya apprit que la netsugi était encore jeune et vivait autrefois dans une forêt loin de là, avant d'être arrachée à sa portée par les agents de Ragnarök.

     

    - Mais … tu as vécu combien de temps ici ? s'étonna Lya.

    - Deux à trois semaines … les mères gardent longtemps leur portée, chez nous, la rassura Kyura. Mais comme ils n'arrivent pas à mettre la main sur mon pouvoir, je suis toujours en vie.

    - Tu as une façon de dire les choses … Si … non, quand nous sortirons d'ici, je m'arrangerai pour te ramener chez toi, fit la jeune magicienne compatissante.

    - Inutile, soupira Kyura. Les humains n'ont pas épargné les autres …

     

    Lya ne rajouta rien, peinée par l'histoire de la netsugi.

    De son côté, la jeune fille lui décrivit sa vie auprès des jeunes japonaises de la 3-A. Lui montra qu'elles avaient réussi à redonner le sourire à Lya, tentant de lui montrer que Kyura avait de quoi apprécier certains humains. C'était pas gagné, mais Lya espérait rencontrer le même succès qu'avec Gira. Bien qu'avec la démone, elle ait encore un peu de travail aussi …

    Alors que le soir tombait, pour la troisième nuit de captivité, des pas se firent à nouveau entendre dans le couloir. Lya frissonna. Elle savait que les agents venaient pour elle. À nouveau, alors qu'elle tentait de s'en empêcher depuis des heures, elle murmura le nom de Yoru, certaine de mourir.

    Mais elle entendit bien vite des jurons. La porte ne voulait pas s'ouvrir. Apparemment, la magie fonctionnait à l'extérieur, parce que la voix de Suano proposa de détruire la porte. Qui ne bougea pas d'un pouce, ce qui le fit jurer encore plus.

    Lya jeta un regard interrogateur à Kyura, qui lui répondit par ce qui ressemblait à un sourire. D'accord, c'était Kyura l'origine de tout ça. D'où le « Dors, tu es en sécurité ». La netsugi avait réussi, par un étonnant tour de force, à les empêcher d'entrer.

    Suano voulut détruire le mur, sans succès.

     

    - Mais qu'est-ce que tu as fait ? chuchota Lya, ébahie.

    - Je t'expliquerai plus tard.

     

    Elles se turent, attendant la suite.

     

    - On va devoir revenir avec d'autres moyens, fulmina Suano.

    - Une pierre anti-magie ? proposa Katsu.

     

    Kyura fit une mine déconfite. Ils avaient compris … mais ils n'avaient toujours pas forcé sa magie. Donc pour l'instant, ça allait encore.

     

    - Une pierre anti-magie ? Sauf que la dernière qui nous reste est derrière cette porte !

    - Bah, on n'a qu'à repousser le projet à demain, et en faire venir une depuis un autre quartier … Du genre, celui des îles de la baie d'Elfanhaft, ce n'est qu'à un jour de vol.

    - Oui, eh bien nos sbires vont voler de nuit !

     

    Puis il partirent, leurs pas furieux résonnant dans le couloir.

     

    - Tu es tranquille pour cette nuit, soupira Kyura, mais après, ça ne dépend plus de moi …

    - Merci … tu fais tout ça pour moi …

    - Bah, si tu meurs, j'aurai beaucoup plus de mal à m'enfuir. Déjà, là, j'en ai pas beaucoup …

     

    Elles continuèrent à discuter, Lya essayant d'ignorer sa terreur. La nuit arrivait, annoncé par les forts instincts animaux de Kyura. La jeune magicienne essaya de se reposer, se sachant en sécurité pour la nuit.

    Puis le matin arriva. Et avec lui venaient Suano et Katsu, qui forcèrent le sort mystérieux en quelques minutes.

     

     

    ***

     

    Quelques heures plus tôt, dans la soirée, Chachamaru cherchait un endroit pour arrimer, quand son radar intégré capta un signal lointain. Elle prévint les autres, qui accoururent.

     

    - Il est encore loin, à un millier de kilomètres je dirais, annonça le robot.

    - Quand l'atteindrons-nous ? s'enquit Kazumi.

    - Avant l'aurore, si on continue maintenant. Ce ne serait pas un problème pour moi, mes batteries sont rechargées.

    - Alors on fait ça, décida la reporter. Tout le monde, on va se reposer !

     

    Yoru, de plus en plus inquiet, s'endormit avec peine. Aussi, quand Sayo vint les réveiller lui et Illonya, il avait l'impression de ne pas avoir beaucoup dormi. Il sortit sur le pont pour laisser le vent frais le réveiller entièrement, et toute la bande le rejoignit.

     

    - Le signal se dirige vers nous, depuis le nord … remarqua Chachamaru. Il n'est plus qu'à cent mètres.

     

    Soudain, une forme noire émergea brutalement des cimes et se posta devant le vaisseau, qui s'arrêta. Yoru fonça en avant pour combattre, sur ses tourbillons, mais s'arrêta, interdit.

     

    - Gi … Gira ?

     

    La démone soupira de soulagement, aussi surprise que le jeune homme. Elle avait attendu deux jours, personne n'était venu, alors au matin du troisième, elle allait affronter Ragnarök seule … mais non. L'équipe l'avait finalement rejointe.

    Yoru et Illonya la présentèrent rapidement au reste de la bande.

     

    - Mais, Gira … fit le jeune homme en souriant à l'idée de la retrouver, où est Lya ?

    - Yoru, je suis désolée de devoir te l'annoncer, mais …

    - Mais … ? répéta Yoru, son sourire fondant comme neige au soleil.

    - Elle a été capturée par Ragnarök il y a trois jours.

    - Quoi ?! s'écria la bande, presque en chœur.

    - Je n'ai rien pu faire. J'ai besoin de votre aide pour la sauver.

     

    Gira s'enquit des capacités de chacun et élabora un plan. Illonya bombarderait les défenses et le QG de Ragnarök avec des sorts, Kû resterait avec elle pour le combat au corps à corps, car Illonya ne combattait qu'à distance. Haruna, qui possédait un artefact d'invocation, les protégerait aussi. Yoru accompagnerait Gira, tous les deux s'infiltreraient dans le bâtiment, que la démone connaissait par cœur. Enfin, Kazumi resterait avec le premier groupe, enverrait tous ses robots espions, sauf un, dans les bâtiments, et préviendraient le duo infiltré des ennemis qui approcheraient, aidée par Chachamaru et Sayo, chevauchant son robot-espion attitré. Le robot serait aussi chargé de craquer tout ce qui était électronique chez Ragnarök, histoire de semer la confusion.

    Tout en élaborant le plan, Gira guida le groupe jusqu'au QG de son ancienne organisation. Le trajet dura deux heures, que Yoru, sur des charbons ardents, sentit passer comme une éternité.

     

     

    ***

     

     

    Le mystérieux sort de Kyura fut forcé, et Suano et Katsu entrèrent. Le premier était assez mécontent, mais le deuxième ne se séparait jamais de son sourire irritant. Lya ne savait pas lequel lui faisait le plus peur … Katsu était clairement le plus sadique des deux, et ne manquait pas une occasion de lui faire du mal. Mais Suano avait l'air assez remonté.

    Elle essaya de se débattre, en vain. Suano l'assomma sans ménagement, et ils l'emmenèrent sous les yeux impuissants de Kyura.

    Lorsque Lya se réveilla, elle était enchaînée à une table de métal, un cercle comme celui du test lui enserrant le front. Une fois de plus, elle commença à paniquer et trembla. Le même scientifique s'affairait devant un énorme écran magique, tandis que Suano et Katsu attendaient dans un coin.

    Le scientifique activa l'anneau. À nouveau, Lya sentit comme une intrusion dans sa tête, et elle ne se retint pas. Elle hurla de terreur. Car l'onde dans son cerveau ne faisait pas que s'infiltrer. Elle tentait d'absorber quelque chose.

     

     

     

     

    1 Ben … Neko, Kitsune, Usagi (chat, renard et lapin) … je ne suis pas allée chercher très loin pour ça …


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    Le badge de Negi vibra étrangement dans sa poche. Le magicien le prit dans sa main, l'observant comme s'il tenait une grenade dégoupillée.

     

    - Qu'est-ce qu'il se passe … murmura-t-il, ébahi.

    - C'est pas normal, ça, marmonna Chisame, leur spécialiste de l'informatique et plus largement de toutes les puces électroniques et autres machins du même genre1.

     

    Puis quelque chose fit tilt dans sa tête. Le badge réagissait à quelque chose, c'était certain. Il y avait forcément une communication, de quelque nature que ce soit, entre l'ailette et autre chose. Chisame invoqua son artefact sans prévenir, qui lui permettait de nombreuses manipulations électroniques, fruit de la magie informatique. La carte prit la forme d'un bâton rose, d'une trentaine de centimètres. Peut-être une référence à ses habitudes de cosplayeuse … et six esprits électroniques ayant vaguement l'apparence de souris volantes jaunes apparurent.

    Elle analysa brièvement le badge, et en effet, celui-ci recevait des ondes électro-magnétiques lointaines.

     

    - Je crois qu'une communication est possible, dit-elle au bout de quelque secondes.

    - Une communication ? s'étonna Kotaro. Avec qui ?

    - Qu'est-ce que tu veux que j'en sache !

     

    La collégienne donna l'ordre à ses esprits électroniques d'établir le contact par le biais de son artefact. Un écran holographique apparut brusquement devant Chisame, légèrement brouillé. La connexion passait assez mal, mais le rendu était visible, au moins.

    Sur l'écran apparut le visage de la jeune fille nommée Gira, épuisée et visiblement dans un sale état.

     

     

    ***

     

     

    Gira attendait, son interface de communication branchée à son détecteur, espérant que ce branchement pour le moins foireux allait fonctionner. Elle n'avait jamais essayé, mais ce n'était pas le moment pour elle d'être sceptique.

    Soudain, alors qu'elle commençait à se demander si ça allait fonctionner, son interface s'illumina brusquement, et l'image légèrement brouillée de trois personnes apparut en hologramme. Une fille rousse se tenait au milieu, entourée de deux jeunes garçons, qu'elle reconnut comme étant Negi Springfield et Kotaro Inugami. Elle fut très étonnée de ne pas voir le robot dont avait parlé Lya : Chachamaru.

     

    - Vous êtes bien la dénommée Gira ? vérifia la rousse, sur la défensive.

     

    La démone acquiesça en silence, surprise qu'elle connaisse son nom.

     

    - Je suis une alliée, entreprit d'expliquer Gira, et je voyageais avec Lya quand nous avons été …

    - On sait, la coupa Negi. Une vidéo a été diffusée, et l'enlèvement a été revendiqué par une organisation nommée Ragnarök.

    - Bien, je n'ai donc pas besoin de vous expliquer dans quel pétrin Lya se trouve en ce moment, fit la démone gravement. Je ne sais pas ce qu'ils lui veulent mais j'espère que ce n'est pas une histoire de vengeance parce que leur maître peut se montrer cruel quand il veut.

    - Avez-vous un plan, Gira ? lui demanda Negi directement.

     

    La jeune fille fut légèrement perturbée par le vouvoiement mais n'en montrait rien. Si ça lui faisait plaisir …

     

    - Pas vraiment. C'est bien pour ça que je vous ai contactés au petit bonheur la chance. Franchement, s'ils l'ont capturée maintenant, c'est que quoi qu'ils veulent lui faire, c'est réalisable maintenant ou dans les prochains jours. Donc je lui donne environ trois ou quatre jours à vivre. Et encore, je suis optimiste, là.

    - Comment tu sais ça ? s'étonna Kotaro, sceptique.

    - J'allais y venir. Dans ce laps de temps, il faut absolument que je m'introduise dans les quartiers de l'organisation pour la secourir. Je faisais partie de Ragnarök, expliqua Gira.

    - Quoi ?!

    - Sauf que comme vous voyez, je ne suis pas vraiment en état de faire ce genre de choses seule, continua-t-elle, imperturbable. Et même si j'étais en pleine forme, contre eux … j'ai donc besoin de renforts, et j'ai pensé à vous directement. Vous êtes ses camarades, non ?

    - Nous ferons tout ce que nous pourrons, affirma Negi sur le même ton.

     

    Une idée sembla traverser l'esprit de Gira.

     

    - Dites, Yoru vous a-t-il rejoints ?

     

    Le trio haussa les sourcils devant sa question. Aucun d'entre eux ne voyait ce que venaient faire les affaires de cœur de Lya dans cette histoire. Enfin, surtout Chisame, parce que Negi, dans sa grande naïveté, n'avait pas encore compris qu'elle et Yoru étaient ensemble, et que Kotaro n'était pas un grand romantique dans l'âme.

    Évidemment, ils n'étaient pas là quand Yoru, à l'aide de son ki, avait instinctivement passé les défenses de Gira et avait repoussé ses attaques comme si de rien était, en Norvège

     

    - Non, finit par répondre Negi. Pourquoi ?

    - Il a un ki énorme. Dans le genre bourrin.

    - Ah ? Jamais senti, pourtant, répliqua Kotaro en haussant les épaules.

    - Et pourtant, c'est le cas. Et comme sa combativité est vachement multipliée quand Lya est en danger, je me disais que Yoru me serait bien utile.

     

    Elle vit Negi murmurer quelque chose à l'oreille de la rousse, qui répliqua en rougissant un truc dans le genre de : « Oublie, c'est pas des histoires qui concernent les gosses comme toi ! », accompagné d'une tape sur le derrière de la tête. Non, Negi n'avait vraiment pas compris ce qui se passait entre Lya et Yoru.

     

    - Nous ne savons pas où il est, soupira Chisame en s'adressant à nouveau à Gira. Mais nous sommes capables de repérer les badges dans un certain rayon.

    - Je m'en suis aperçue, affirma Gira.

    - Une équipe est partie sur un tour du monde pour retrouver nos membres manquants. Ils l'ont peut-être déjà retrouvé. Où êtes vous à peu près ?

    - À l'ouest d'ici, à à peu près neuf cent kilomètres.

    - Avec le trajet prévu, l'équipe devrait passer par là d'ici deux jours, avança Chisame. Avec un peu de chance, Yoru sera avec eux. Sinon, je suis sûre que les membres à bord sauront vous aider et la sauver. C'est pour l'instant tout ce qu'on peut faire.

    - Et toi Negi, tu n'y vas pas ?! s'exclama Kotaro. Et ta Magia erebea, alors ?

    - Ah non, s'insurgea Chisame en préparant les ananas, vous n'allez pas recommencer tous les deux !

     

    Mais Negi ne s'indigna pas, au contraire.

     

    - Je ne la maîtrise pas encore suffisamment, répondit le petit magicien, désolé.

     

    Gira n'osa pas demander ce qu'était la magia erebea. Ça avait l'air d'être puissant, vu la réaction du jeune homme-loup, mais si ça ne pouvait pas les aider, elle n'avait aucune raison de perdre du temps avec.

     

    - Je ferai avec, fit Gira. Mais si votre équipe n'est pas ici au soir du deuxième jour, j'attaquerai seule. J'ai une dette envers Lya, et ses ennemis sont les miens, je ne la laisserai pas mourir entre les mains de Ragnarök.

     

    Negi hocha la tête d'un air entendu.

     

    - Soyez prudente, et refaites bien vos forces avant d'y aller.

    - Sinon, Lya perdrait toute chance de survie, j'en suis consciente, finit Gira pour lui.

     

     

    ***

     

     

    L'équipe du Great Paru ne se doutait toujours de rien. Le trajet prévu initialement avec les vaisseaux-baleines avait été gardé, et la petite équipe n'accusait pas de retard, heureusement : ils atteindraient Ostia trois jours plus tard.

    Yoru avait remarqué un changement dans l'attitude d'Illonya, mais il s'apercevait bien que la jeune norvégienne tentait de le cacher. Si cela avait été Lya, le jeune homme aurait cherché à savoir immédiatement, mais là, il préférait attendre que son amie se confie d'elle-même. Ce qu'il ne savait pas, c'est qu'elle n'en avait pas du tout l'intention. Dommage …

     

     

    ***

     

     

    Les flèches de feu touchèrent la petite Lya, qui poussa un cri de douleur.

    Encore. Cette vision, celle où une inconnue la protégeait de Suano, avait encore recommencé.

    La petite s'écroula et se cogna la tête sur le sol. Un peu de sang coula sur sa tempe. Tout devint noir. Mais étrangement, elle n'avait pas perdu conscience. Car elle entendit très clairement sa propre voix d'enfant hurler. Mais ce n'était pas le nom d'Arianna que la collégienne entendit.

     

    - ALSIAAAAAA !!!!!!

     

    Lya se réveilla en sursaut et son corps chuta brutalement vers l'avant, jusqu'à ce que quelque chose l'arrête. La jeune fille reprit ses esprits en haletant. Elle était assise sur un sol froid, de pierre, adossée contre un mur tout aussi gelé. La pièce était très sombre, et ses yeux mirent du temps à s'en accommoder.

    Puis Lya sentit ce qui l'avait stoppée dans sa chute. Elle était enchaînée au mur. Ses ravisseurs lui avaient laissé assez de marge pour qu'elle puisse changer légèrement de position et que ses muscles ne s'ankylosent pas. Mais ses mains étaient attachées dans son dos, et ses mouvements étaient suffisamment entravés pour qu'elle ne puisse pas s'allonger ou s'accroupir. Ça pouvait vouloir dire une chose : ils comptaient la garder un moment, et non pas l'espace d'une heure ou deux. Et ses blessures avaient été sommairement guéries, suffisamment pour qu'elle puisse reprendre quelques forces et que ça ne s'infecte pas. Mais pas complètement, fallait pas pousser non plus.

    Lya commença à paniquer, son souffle s'accéléra et son corps se mit à trembler violemment. Elle avait peur. Très peur. Qu'allaient-ils lui faire ? Qu'allait-elle devenir ? Allait-elle mourir, alors qu'elle venait seulement de retrouver le bonheur et le sourire ?

     

    - Yoru … gémit-elle dans un souffle, effrayée. Je t'en prie … au secours …

     

    Les larmes commencèrent à couler sur son visage, alors que sa peur augmentait au fur et à mesure, accompagnée par les cliquetis de ses chaînes, qui bougeaient à cause de ses tremblements. Elle ne pouvait même pas faire appel à sa magie ou à son ki. Les yeux agrandis par la peur, elle se sentait nue, à la merci même du plus faible des adversaire. Lya était redevenue la petite apeurée qu'elle était avant, et elle sentit plus que jamais le vide que créait l'absence de ses parents et son amnésie. Elle aurait voulu avoir un nom à appeler. Pouvoir crier « papa », et savoir qui est ce père qu'elle appelle à l'aide. Mais elle ne le pouvait pas. Paniquée, elle perdait ses moyens, et la seule chose qu'elle put espérer fut que Yoru lui vienne en aide. Yoru, qui était à des centaines de kilomètres, sinon plus. Qui ne pourrait pas l'aider. Ses sanglots silencieux redoublèrent, elle hoqueta, avec sa peur qui lui tordait l'estomac.

    Soudain, elle entendit des bruits de pas résonner derrière sa porte. Elle sécha ses larmes avec ses genoux, ramenés devant elle. Peu importe à quel point elle était paniquée, elle ne se montrerait pas défaite devant l'ennemi. Sa fierté l'en empêchait. La porte s'ouvrit, et un peu de lumière entra dans la cellule.

     

    - Alors, comment ça va, petite tête ? Pas trop inconfortable, j'espère ! lança une voix en riant.

     

    Elle reconnut immédiatement la voix en question avant même de voir son visage, sans comprendre. Pourquoi ? C'était un malentendu, n'est-ce pas ? Il était venu la sauver, pas vrai ?

    À l'évidence, non. Pas avec ces yeux verts mi-méprisants, mi-malicieux. Le jeune homme, d'une vingtaine d'années, s'approcha d'un pas conquérant, ses cheveux roux lui tombant sur ses épaules, un sourire amusé étalé sur le visage. Non, il n'était pas là pour la sauver.

     

    - Katsu … murmura-t-elle, épouvantée.

    - Franchement, tu nous as fait courir ! Tout ça par la faute de cet abruti de Suano, qui n'a pas réussi à tuer Gira en temps et en heure, et qui s'est en plus laissé endormir par un de tes sorts … Enfin, maintenant, tu es là, c'est le principal.

    - Pourquoi ? cracha-t-elle, d'une voix haineuse.

    - Pour mon maître. Pour l'argent.

     

    Katsu s'arrêta un moment. Puis reprit, avec un sourire sadique.

     

    - Et puis, j'avoue que je me suis bien amusé … oui, jouer avec Arianna m'a bien amusé !

    - Quoi ?! s'exclama Lya, comprenant vaguement qu'il avait fait du mal à son maître.

    - J'ai repris les mimiques et le comportement de son cher et défunt petit frère … Cette cruche a marché, et plutôt deux fois qu'une ! Elle s'est attachée à moi à la première seconde ! s'esclaffa le traître.

     

    Lya gronda. C'était un grondement inhumain, haineux. Arianna ne supportait pas que l'on fasse du mal à son élève, et c'était réciproque. Elle haïssait Katsu, autant que le maître de celui-ci. Mais, réduite à l'impuissance, la seule chose qu'elle réussit à faire, c'est faire rire le jeune homme.

    Soudain, quelque chose tomba de la poche de Katsu et s'ouvrit sur le sol. C'était un médaillon, qui contenait une photo. La réplique de celle que Lya avait récupéré chez elle, en plus petite. Ce médaillon, la jeune magicienne l'avait toujours vu au cou d'Arianna.

    Elle comprit immédiatement. L'inconnu qui l'avait vaincue, et qui avait défait son maître en Norvège, c'était Katsu. Qui était revenu ensuite avec les blessures causées par Arianna, les faisant passer pour des blessures d'un combat contre un magicien de Ragnarök.

     

    - Salaud … grogna Lya, tremblant cette fois-ci de fureur.

    - Allons, allons un tel mot dans la bouche d'une jolie jeune fille ! s'amusa-t-il.

     

    Rien à faire, elle ne l'atteindrait pas. Il se servait de ses paroles pour la faire enrager. Mais c'était peut-être mieux comme ça, car s'il se mettait en colère, elle ne pourrait rien faire, enchaînée. Seulement, dès qu'elle voyait son visage, elle se rappelait du Katsu qu'elle connaissait. De ses blagues, de son humour limite provoquant, des entraînements avec lui. Les deux rivaux s'étaient si bien entendus que Yoru en était devenu jaloux, ayant peur que Katsu drague sa petite amie. Mais Lya s'apercevait bien maintenant que tout n'avait été qu'une comédie pour gagner la confiance de tout le monde.

     

    - Tu es priée de te tenir tranquille, fit Katsu, à peine plus sérieux. Il ne reste que peu de temps avant que les tests soient prêts. Si tu es sage, on fera peut-être en sorte de ne pas trop te faire souffrir.

     

    Elle attendit qu'il sorte de la cellule pour déglutir, paniquée par sa dernière phrase. De quels tests parlait-il ? Qu'est-ce que Ragnarök allait lui faire ? Quels tests allait-elle subir ? QUELS TESTS ?!!

    Soudain, elle remarqua un mouvement au fond de sa cellule. Ou plus précisément dans une cellule juxtaposée, derrière des barreaux. Dans l'obscurité, elle apercevait la forme d'autres barreaux. Une petite cage à l'intérieur-même de la cellule.

    Et une petite voix retentit.

     

    - Qui es-tu ?

     

     

    ***

     

     

    Arianna rageait. Cela faisait deux semaines qu'elle était enfermée, mais dans le monde magique, le temps ne s'écoulait pas de la même façon. Là-bas, certainement un ou deux mois étaient passés. Et la magicienne croupissait toujours dans sa cellule, sur Terre.

    Mais cela ne voulait pas dire que Lya était en sécurité. Les deux mondes étaient coupés l'un de l'autre, les agents terriens de Ragnarök ne pouvaient donc pas recevoir d'ordres du quartier général pour tuer la magicienne de foudre.

    Soudain, la porte s'ouvrit, et une personne encapuchonnée entra dans la cellule. Puis s'arrêta à la limite des barrières qui entouraient Arianna pour plus de sécurité. La captive s'apprêta à envoyer paître l'ennemi qui voulait lui parler. Elle ne le fit pas. La personne avait enlevé sa capuche.

     

    - Toi ? chuchota Arianna, les yeux agrandis par la surprise. Qu'est-ce que tu fais là ?

    - Je dois m'entretenir avec toi. Faisons vite, je n'ai pas beaucoup de temps, soupira la femme. Écoute, pour l'instant je ne peux pas de sortir de là, ma grande.

     

    Le « ma grande » faisait un peu étrange, utilisé pour une femme ayant la trentaine, mais Arianna ne s'en formalisa pas. Après tout, son interlocutrice ne l'avait pas vue depuis longtemps. Mais son ton affectueux lui fit chaud au cœur.

     

    - Mais bientôt, les conditions pour que les deux mondes soient à nouveau liés seront réunies, jusqu'à mêler les deux mondes pour quelques heures, poursuivit la femme. À ce moment-là, Ragnarök sera déstabilisé, et tu pourras t'échapper et rejoindre ton élève. Lya aura certainement besoin de ton aide.

    - Comment sais-tu que les deux mondes seront réunis ?

    - Je le sais de source sûre. Ne t'inquiète pas pour ça. Attends juste le bon moment, sans changer ton attitude. Tes geôliers ne doivent se rendre compte de rien. Ils ne peuvent rien te faire, eux aussi doivent attendre que le contact entre les mondes soit rétabli pour recevoir des ordres.

    - Dis … est-ce que tu sais si Lya est encore en vie ? demanda Arianna d'un ton implorant.

    - Je l'ignore … mais je l'espère moi aussi du fond du cœur.

     

    La femme la salua affectueusement, remit sa capuche et repartit.

     

     

    ***

     

     

    Thelis, arrivé dans Megalomesembria quelques heures auparavant, entra dans un imposant bâtiment. Il monta d'énormes escaliers, salua au passage quelques employés de l'administration, et s'orienta dans un dédale de couloirs richement décorés. Le sénat de la confédération aimait bien montrer sa richesse …

    Il arriva devant une porte, où il frappa et déclina son identité.

     

    - Vas-y, entre, lança une voix d'un ton amical.

     

    Le bureau, un peu plus sobre que le reste du bâtiment, était surtout décoré par des photos. Ici, on voyait un navire-requin, là, une équipe militaire … et au milieu de la pièce trônait une table, derrière laquelle un homme attendait. Il était brun, les cheveux dressés en de longs pics dirigés vers l'arrière, soulevés par une demi-tonne de gel. L'homme était plutôt musclé pour un bureaucrate … mais Thelis ne fut pas étonné. Après tout, il connaissait bien le capitaine Ricardo, maintenant homme politique.

     

    - Alors ? Comment s'est déroulée ta mission ? s'enquit jovialement Ricardo.

    - Eh bien, c'était assez mouvementé … surtout la dernière semaine, mais dans l'ensemble, ça c'est bien passé, expliqua Thelis en lui remettant un coffret. Tiens, c'est ce que tu m'as demandé. Nos agents l'ont enfin retrouvé.

     

    Ricardo en sortit un orbe transparent, suffisamment petit pour tenir sans un poing fermé.

     

    - Merci, ça va nous être utile.

    - Et tu vas être content, chuchota Thelis, la mine réjouie. J'ai trouvé un des membres de l'ala alba. Enfin plutôt deux, mais j'ai voyagé avec le jeune Yoru. Leurs retrouvailles commencent à s'organiser …

    - Bonne nouvelle, fit Ricardo, enthousiaste. Faudra que je contacte Theodora …

     

     

     

     

     

     

     

    1 C'est incroyable comme on voit direct la graaaaande connaissance de l'auteure de cette fanfiction dans le domaine …  


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  •  

    Le lendemain matin, Lya se leva vers dix heures. Kaede était déjà partie et les jumelles dormaient. C'était un soulagement. Elle aimait, parfois, être seule et se perdre dans ses pensées. De cette façon, elle s'échappait de cette vie, qui dans son ancienne ville devenait un enfer dès qu'elle s'approchait de quelqu'un

    Elle fit le point sur ce qui s'était passé depuis le jour de son arrivée. Puis soudain, un souvenir lui revint. Un souvenir plutôt amer … elle s'en souvenait comme si c'était hier. Le jour où Suzuha , la seule amie qu'elle avait eue, l'avait rejetée dès qu'elle avait découvert que toutes les choses étranges qui se passaient, c'était autour de Lya. Quelle idiote elle faisait ! Quand ces trucs se reproduiraient, les autres feraient la même chose, et c'était normal … Comme Suzuha, les filles seraient effrayées, elle l'éviteraient comme la peste ! Des larmes commencèrent à couler avec ce souvenir et cette peur qui revenaient, lui tordant l'estomac. Mais Fumika commençait à se réveiller, et s'assit, les yeux encore endormis.

     

    - Lya, t'es déjà levée ? Bah … bah … qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu pleures ?

    - C'est rien ! cria la jeune fille en courant hors de la chambre.

     

    Lya crut croiser quelques élèves dans sa course mais elles n'étaient pas de sa classe. Tant mieux. Elle ne tenait pas à ce que quelqu'un la voit comme ça.

    Sortie, elle se demanda où aller. La jeune fille ne connaissait pas encore la ville, et elle avait peur de rencontrer des camarades, ce qui ne ferait que l'embarrasser davantage. Elle décida d'aller dans la forêt et la montagne, assez proches du dortoir, pour se remettre les idées en place.

    Hantée par le souvenir de Suzuha, Lya se mit à courir jusqu'à ce qu'elle quitte la ville de Mahora. Arrivée dans la forêt, elle suivit les sentiers, sans trop regarder où elle allait. Ses larmes continuaient de couler d'elles-mêmes, et elle avait l'impression que Suzuha était partout. Derrière chaque arbre, à chaque tournant. Elle l'entendait presque murmurer à son oreille, lui dire des choses que Lya savait déjà. Où qu'elle aille, elle serait toujours seule, évitée. Elle se ferait quelques amis, comme ses colocataires, pour mieux les perdre ensuite … N'importe où, elle trouverait des gens comme Ichiro. À Mahora ou ailleurs, ce serait pareil.

    Lya était maintenant assez loin du dortoir, et chercha une clairière pour s'arrêter un peu. Clairière qu'elle trouva vite, heureusement. Lya devait réfléchir, et arrêter de pleurer. Les choses bizarres qui lui arrivaient souvent ne s'étaient pas encore manifestées. Elle ne devait donc pas y penser pour le moment. Ça risquait de lui gâcher la vie plus qu'autre chose. Mais elle n'y pouvait rien. Suzuha, qui l'avait apprivoisée pour mieux la laisser tomber, hantait chaque coin de son esprit, se faisait oublier de temps en temps, pour mieux l'assommer de chagrin.

    Tout à coup, des pas se firent entendre. Zut, quelqu'un venait ! Lya n'avait pas le temps de partir. Et elle avait la furieuse impression que si elle tombait sur quelqu'un qu'elle connaissait, ses larmes allaient recommencer à couler …

     

    - Lya, qu'est-ce que tu fais là ?

     

    La voix marqua un temps d'arrêt, comme interloquée.

     

    - Attends … Tu pleures ? fit une voix que la jeune fille ne connaissait que trop bien.

    - Kaede !? C'est toi ?

     

    Lya, ahurie, se leva et la suivit. Mais qu'est-ce que Kaede venait faire là ?! Son amie l'emmena là où elle avait mis ses affaires, dans un endroit où elles pouvaient parler à l’abri des oreilles indiscrètes. Puis elle répondit à sa question, à savoir pourquoi elle était là.

     

    - Ah bon, tu t'entraîne au ninjutsu ici tous les week-ends ?! s'exclama Lya, ébahie.

    - Oui. Je peux compter sur toi pour garder ça secret ? demanda Kaede.

    - Bien sûr ! Attends … Tu es vraiment une ninja ?!

    - Pas tout à fait, je suis encore en phase d'entraînement … Au fait, pourquoi tu pleurais ?

     

    Ben tiens … Kaede ne perdait pas le nord !

     

    - Euh …

    - Bah, c'est pas grave si tu ne veux pas le dire.

     

    Les deux jeunes filles furent interrompues par le portable de Kaede qui sonna. Les jumelles devaient commencer à se poser des questions quant à son départ précipité. Pendant ce temps, Lya réfléchit rapidement. Était-ce comme Kaede le disait ? Ne voulait-elle pas le dire ? Ou était-elle simplement paralysée par la peur ? Évidemment, elle avait peur du rejet ! Oh oui, Suzuha était un souvenir cuisant ! Mais Lya pouvait-elle continuer à se terrer, dans la peur que des évènements étranges se produisent à nouveau ? Elle avait le sentiment que non. Elle avait besoin de se confier. Cependant, elle hésitait vraiment.

     

    - Hein ? Lya ? demanda Kaede au téléphone. Oui, elle est avec moi. Oui, on rentre en fin d'après-midi. À ce soir.

    - Euh, je crois que je suis partie un peu trop vite, dit la jeune fille un peu embarrassée.

    - C'est vrai, mais ce n'est pas grave, ça peut arriver à tout le monde. Mais, dis-moi, j'aimerais juste savoir si tu vas bien.

    - Oui, ça va, ne t'inquiète pas …

     

    Lya ne pouvait bien sûr pas lui dire directement qu'elle avait peur d'être isolée, puisque ça risquait surtout de la lancer dans des explications qu'elle n'était pas certaine de vouloir donner. Elle opta donc pour autre chose. D'aussi peu efficace, à vrai dire.

     

    - Dis-moi, demanda-t-elle soudainement, si une de tes amies commençait à agir bizarrement, qu'est-ce que tu ferait ?

    - Agir bizarrement ? Que veux-tu dire ?

    - Euh … si des choses apparaissaient autour d'elle …

    - Je sais pas trop. Mais je suppose que j'essaierais de savoir ce qui se passerait. Pourquoi ?

    - Ah ? Euh … pourquoi ? Pour savoir !

    - Il y a bien une raison pour laquelle tu me demandes ça.

     

    Lya soupira – pour la énième fois depuis le début de la journée – en songeant qu'elle n'y couperait pas. En même temps, elle l'avait un peu cherchée, cette situation. Maintenant qu'elle était lancée, elle devrait raconter ce qu'elle souhaitait pourtant garder secret. La collégienne respira un bon coup, puis elle se mit à décrire ses problèmes et ses inquiétudes. Au fur et à mesure qu'elle parlait, elle eut l'impression que tous ses soucis disparaissaient comme un sac qu'elle vidait.

    Cependant, quand Lya arriva à la fin de son récit, elle ressentit tout de même la peur qui revenait au grand galop. Qu'allait dire Kaede ? Et si son amie l'évitait ? Et si la classe l'isolait, ne l'acceptait pas ? Que ferait-elle ?

    Kaede, elle, avait écouté avec étonnement l'étrange récit de sa colocataire. Cela lui faisait penser à autre chose … une chose à laquelle elle avait assisté il y a peu, et qui lui avait fait prendre conscience que son monde n'était peut-être pas exactement comme elle se le représentait. D'ailleurs, alors que Lya finissait de parler, elle aurait juré avoir senti la température chuter légèrement, la faisant frissonner. Mais elle se voulut rassurante

     

    - Et donc, tu crois qu'on va te fuir pour ça ? releva la ninja, surprenant Lya.

    - Ben justement, je ne veux pas ! Mais vu que c'est ce qui s'est passé depuis toujours … J'ai peur de vivre à nouveau la même chose qu'avec Suzuha. Ça me hante …

    - Alors, je vais te dire tout de suite : ça ne risque pas d'arriver.

    - Comment tu sais ce qui va se passer ? s'étonna Lya.

    - Tu dis que c'est parce que tu sembles bizarre aux autres ? Eh bien Chachamaru est un robot et notre professeur principal est un garçon de dix ans. Tu as déjà vu ça ? C'est pas tout à fait normal, répondit la grande fille, ironique. Au contraire, si tu n'es vraiment pas ordinaire, alors tu as tout à fait ta place dans cette classe !

     

    Aaaah ! C'était donc ça, ces étranges antennes qu'arborait Chachamaru ! Bon, d'accord, après réflexion c'était pas faux. Lya se mit à penser qu'elle avait beaucoup de chance, tout d'un coup. Le directeur de Mahora l'avait mise pile dans la classe qui lui convenait le mieux ! Et, en poussant encore plus loin, la chambre que mademoiselle Shizuna lui avait choisie était parfaite, puisque Kaede, sa colocataire, avait réussi à la rassurer en un temps record.

    C'est donc apaisée et sereine que Lya rentra au dortoir en compagnie de son amie. Dans son esprit, il n'y avait plus que le lendemain, le grand jour du départ que tout le monde attendait. Suzuha se faisait gentiment oublier, et son souvenir n'était pas près de revenir. Du moins elle l'espérait.

     

     

    ***

     

    DRIINNNNNG ! Et c'était reparti … c'était incroyable de voir à quel point un pauvre réveil pouvait se montrer si irritant. Lya en avait marre de se réveiller en sursaut, à la fin ! Comme deux jours auparavant, les jumelles se levèrent en grognant, et Kaede était déjà debout. La jeune fille ne savait pas comment son amie faisait. Elle devait avoir un truc, c'était sûr ! Qui sait, peut-être était-ce l'habitude, avec l'entraînement ?

    Bon, Lya devait peut-être arrêter ce fichu réveil avant qu'il ne sonne à nouveau, ce serait mieux. Alors, récapitulation. Elle devait se lever et s'habiller. Ensuite, elle et ses colocataires petit-déjeunaient, puis rejoignaient tout le monde à la gare. Bon, bah, y avait plus qu'à le faire.

     

    - Bonjour... dit Lya, en baillant comme deux jours plus tôt.

     

    Les autres lui répondirent avec entrain, surtout les jumelles, excitées comme des puces. On aurait dit des piles électriques ! Arf, elles étaient bruyantes dès le matin, celles-là …

    Enfin, Lya ne pouvait pas se moquer : elle aussi avait hâte d'y être. Ce que lui avait dit Kaede la veille l'avait vraiment rassurée, alors elle avait l'intention de profiter le plus possible de ce voyage. Elle comptait bien apprendre à connaître ses camarades, échanger avec elle, et éloigner le souvenir de Suzuha pour de bon.

    Une demie-heure plus tard, elles étaient à la gare. Il y avait beaucoup de monde, car une autre classe partait aussi. Autant dire que les quais étaient bondés !

    Negi essayait de mettre un peu d'ordre dans tout ce bazar et donna les consignes, tout comme mademoiselle Shizuna, monsieur Seruhiko et monsieur Nita, qui accompagnaient aussi. Au plus grand dépit de Lya, qui avait vraiment du mal avec ce dernier …

     

    - Que chaque classe forme 6 groupes avec un responsable par groupe ! s'exclama Negi dans tout ce tumulte.

    - Kaede, je peux venir ? demanda Lya, ne connaissant pas encore toutes ses camarades.

    - Bien sûr.

     

    Il ne restait plus qu'à voir avec qui elles allaient aller. Elles rejoignirent cinq élèves, mais Lya ne se souvenait plus de leurs prénoms … si un jour elle les avait sus. Elle reconnaissait bien les deux chinoises de la classe, mais c'était tout.

     

    - Kaede, tu viens ? Oh, Lya, tu veux venir aussi ? lança l'une d'elle.

    - Euh... ou...oui ! Par contre les prénoms c'est pas encore ça, désolée …

    - Pas de problème, moi c'est Chao ! Là, il y a Kû-Fei, Misora, Satsuki et Satomi, répondit la même élève en désignant une après une ses camarades.

     

    Ah, la fameuse Misora ! Maintenant, elle voyait bien qui c'était. La rouquine arborait un sourire malicieux : oui, cette fille-là était bien capable de suivre les jumelles dans leurs facéties ! Satsuki était légèrement enrobée, mais adorable, paisible. Sa douceur se retrouvait dans ses prunelles noisette et elle portait ses cheveux noirs en deux couettes, un peu comme Fûka. Enfin, Satomi portait de grosses lunettes devant ses yeux noirs, et avait tressé ses cheveux de chaque côté de sa nuque. Kaede lui expliqua que c'était Chao, aidée de Satomi, qui avait créé Chachamaru.

    Après les présentations, elles entrèrent dans le train qui venait d'arriver. Lya s'assit automatiquement à côté de Kaede, devant une petite table en face de deux autres places où s'assirent Tchao et Kû-Fei. Les quatre filles commencèrent à parler de tout et de rien, du voyage, de leur classe … Quand, de façon tout à fait imprévue, le sujet dériva sur leur nouvelle camarade. Qui jeta un coup d'œil mal assuré à Kaede. Cette dernière lui répondit par un sourire et un clin d'œil. Assez facile à interpréter comme message : « arrête de stresser pour rien ». Bah bien sûr ! Elle aurait bien aimé voir la ninja à sa place, pour voir comment elle s'en sortirait ! Mais Lya décida de lui faire confiance. Elle raconta son passé.

     

    - C'est vrai ?! demanda Kû-Fei, ahurie, une fois que la jeune fille se fut tue.

    - Oui …

    - T'inquiète, on n'est pas comme ça ! la rassura Tchao.

    - Qu'est-ce que je disait ? fit Kaede à Lya en riant.

    - Qu'est-ce que tu veux dire ? questionna la chinoise blonde.

    - Rien, c'est juste que j'y ai eu le droit avant et qu'elle avait peur de raconter ça.

     

    L'intéressée s'apprêtait à répliquer quand elle entendit un cri venant de l'avant du train. Les quatre amies se levèrent toutes en même temps et s'aperçurent que … il y avait des grenouilles ! Mais d'où elles sortaient ?! Il y en avait des dizaines ! Elles commencèrent toutes à essayer de les attraper quand Lya s'aperçut que son professeur avait l'air de réfléchir au lieu de faire quelque chose et que … euh ... bon, pas de temps à perdre pour chercher son nom, une fille avec des cheveux noirs regroupés en une queue vers la gauche se tenait à l'écart.

    Tout le wagon se mit à bondir après les batraciens dans un ensemble assez ridicule. Une chose était à retenir : des 3-A sautant comme des grenouilles en essayant d'attraper des grenouilles, avaient l'air aussi gracieuses qu'une trentaine d'éléphants montés sur ressorts dans un petit magasin de porcelaine.

    Après un long moment de folie, toutes les grenouilles furent attrapées.

     

    - 108 grenouilles ! Enfin ! lança Kû-Fei, épuisée.

    - Euh … ! lança une fille nommée Makie.

    - Va chercher les filles du club sanitaire ! Ayaka, fais passer un appel d'urgence ! ordonna Negi.

    - Euh … on va avoir un petit problème parce que le club sanitaire est dans les pommes aussi ! répondit Asuna.

     

    En effet, elle tenait dans ses bras une fille évanouie, avec des cheveux courts et gris-argenté. C'était la seule membre du club sanitaire de la classe ? Son nom lui revint en mémoire : Ako.

    Juste après cet … évènement, Lya, perturbée, surprit une discussion entre la déléguée Ayaka, Asuna et Konoka.

     

    - Asuna, Konoka ! Setsuna a disparu, dit-elle.

    - Quoi ?! s'exclama Asuna.

    - Disparu ? demanda Konoka, inquiète.

     

    Ah oui, la fille que Lya avait vue quelques instants plus tôt, aux cheveux noirs, s'appelait Setsuna. Cette dernière avait l'air étrange, elle aussi. Cependant, elle revint vite, comme si de rien n'était.

    Lya commençait à s'inquiéter sérieusement. Les événements qui avaient fait sa triste réputation par le passé ne ressemblaient pas à une invasion de grenouilles, enfin … sa présence avait-elle pu provoquer ce qui venait de se passer ?

    Heureusement, le voyage finit sans autre incident et la classe arriva à Kyoto.

     

    - Que tout le monde prépare ses affaires ! lança le professeur

    - Déjà ? s'exclama une élève.

    - Ça a été vite ! lança une autre.

     

    Les élèves étaient enthousiastes à la mode 3-A, autrement dit : le niveau de décibels dépassait largement le niveau raisonnable. Et Lya faisait partie du nombre, même si elle se montrait un peu plus réservée et silencieuse. Elle n'était jamais allée à Kyoto, et n'avait jamais profité d'un voyage scolaire.

    Setsuna, elle, avait encore une expression étrange vissée sur le visage et fixait étrangement Negi comme si c'était une grenade ambulante. Elle se baladait constamment avec un objet long entouré dans du tissu. Lya se découvrit une curiosité maladive, mais se retint d'aborder sa camarade. Ce n'était pas ses affaires et Setsuna n'avait pas l'air commode.

     

    - Ok, tout le monde dehors ! s'exclama le petit professeur, aussi enthousiaste que les autres.

    - YEEEEEEEAAAAAAAAAAAH !!!!!!!!!!!!!

     

    La visite de Kyoto commença. C'était merveilleux ! Lya n'avait jamais vu autant de temples d'un coup, et l'ancienne capitale était d'un beauté à couper le souffle.

    Tout se passa bien jusqu'à ce que la classe arrive à la cascade Otawa. Elle était composée de trois jets d'eau et on disait que boire à chacun de ces trois jets apportait la santé, la réussite professionnelle et un bon mariage. Voyant comment étaient certaines des filles avec le petit professeur, Lya devina immédiatement qu'une bonne dizaine allait se jeter sur le troisiè...

     

    - Le troisième est pour moi ! lancèrent Ayaka et compagnie.

     

    … me jet. C'était couru d'avance.

    Beaucoup en prirent … et en reprirent. Une odeur que Lya connaissait chatouilla ses narines, dérangeante … qu'est-ce que c'était ? Elle n'arrivait pas à se le rappeler, mais une chose était sûre, elle n'aimait pas cette odeur.

    Soudain, elle vit ses camarades s'écrouler par terre. On aurait dit qu'elles étaient ivres mortes ! Lya identifia immédiatement l'odeur : du … saké. L'eau du troisième jet avait été remplacée par du saké, et les filles n'y avaient vu que du feu. Et maintenant, une dizaine d'élèves, dont les jumelles, gisait sur le sol, complètement saoules. Oh oh, si un des adultes voyait ça, elles étaient mal barrées … En parlant du loup, les trois accompagnateurs pointèrent le bout de leur nez. Ben tiens … ils n'auraient pas pu attendre un peu ?

     

    - Oh, M.Nita, M.Seruhiko ! s'exclama Asuna, un chouïa affolée.

    - Qu'est-ce qui se passe ici, Negi ? demanda mademoiselle Shizuna.

    - Rien ! Rien du tout ! répondit-il, lui aussi se demandant ce qu'ils allaient faire.

    - Une partie du groupe est fatiguée et se repose un peu … lança Yue, en désespoir de cause.

    - On va les conduire au bus et les ramener à l'auberge !

     

    Yue n'était pas bien grande, grosso modo de la taille de Negi, peut-être un peu plus grande. Deux larges queues rassemblaient la quasi totalité de ses cheveux violets – décidément – sauf deux tresses attachées par des grelots qui encadraient son visage. Yue était toujours avec Nodoka et Haruna, ses meilleurs amies, et faisait apparemment partie du club de philosophie. Sauf que là, elle n'avait pas l'air très crédible …

    Allez savoir pourquoi, ils mordirent à l'hameçon comme une bonne grosse bande de niais. Du coup, la classe entière rejoignit l'auberge.

     

    - T'as assuré, glissa Lya à Yue. Même si je dois t'avouer que je n'y croyais pas …

    - Oh, moi non plus, c'est sortit tout seul, sourit la jeune philosophe.

     

    Elles aidèrent rapidement celles qui étaient saoules à se coucher. Heureusement, personne dans le groupe de Lya n'avait bu … Kaede avait l'air plutôt perplexe, Satomi bricolait quelque chose dans un coin. Chao et Kû-Fei, éternelles meilleures amies, discutaient arts martiaux ; apparemment elles faisaient partie d'un club de sport de combat. La conversation tourna nourriture lorsque Satsuki se joignit à elle : Satsuki avait une réputation de véritable cordon bleu, et de ce qu'elle entendait, Lya était très curieuse de goûter à ses plats. Mais malheureusement, la nouvelle n'avait pas la tête à deviser sur des plats, aussi bons soient-ils : elle se demandait si sa poisse ne revenait pas au grand galop, et le souvenir de Suzuha commença à remonter. Elle le chassa d'un geste de la main et s'intéressa à l'organisation.

    Les enseignants étaient les premiers à se laver. Ce qui laissait le temps à la jeune fille de se remettre de ses émotions et de penser à autre chose que du sake et des grenouilles … ben quoi ? Elle n'aimait pas les batraciens ! C'est vrai, ça saute partout, c'est visqueux …

    Finalement, tout le monde se coucha tôt. Bon, d'accord, un tiers des élèves étant déjà sur le carreau, ce n'était pas plus étonnant que ça. Toujours est-il que Lya avait un drôle de pressentiment, depuis les grenouilles et cette histoire de saké. Pressentiment qui n'allait pas s'arranger …

     

     

    ***

     

     

    - Lya, c'est l'heure ! s'exclama une voix.

    - Mmh, encore cinq minutes ! gémit la jeune fille.

    - Ben ça va pas être possible, on doit se préparer pour la visite.

    - Hein, quoi ? Oh, c'est toi, Kû-Fei...

    - Hahaha, t'es vraiment pas du matin ! s'exclama la chinoise. Au fait, tu peux m'appeler Kû, comme tout le monde !

     

    Le petit groupe commença donc la visite de Nara. Comme la veille, Lya en eut plein les yeux. Elle ne vit même pas le temps passer, et la seule chose qui leur annonça qu'il était deux heures, c'était le ventre de Kû qui réclamait ferme.

     

    - Tu es déjà partie en voyage de classe ? s'enquit Satsuki.

    - Jamais ! C'est la première fois, et c'est génial, s'extasia la nouvelle.

    - C'est vrai que Kyoto, ce n'est pas n'importe où. D'habitude, on part à Hawaï, alors ça nous change un peu.

    - C'est quoi, le programme de demain ?

    - C'est journée libre.

     

    L'après-midi passa à une vitesse folle, à l'image du matin. La tête de Lya bourdonnaient d'images et de sons, elle avait vu des tas de monuments, de curiosités. Quand elle rentra en compagnie de son groupe, elle était tout à fait lessivée, ce qui en fin de compte ne changeait pas des masses de d'habitude. Elle avait juste plus de courbatures qu'à l'accoutumée.

    Elle avait donc prévu de se coucher tôt, ce qui n'était pas tout à fait le programme de ses camarades. Leur première soirée ayant été gâchée par le saké, la majeure partie de la 3-A avait l'intention de se défouler sur Negi… une histoire de course au baiser, ou quelque chose comme ça … Mais bon, comme elles ne pouvaient pas faire de bruit à cause de M.Nita, Lya s'en fichait complètement, elle ce qu'elle voulait c'était dormir.

     

     

    ***

     

     

    - Aaaaah, j'ai ENFIN réussi à me lever tout seule … fit Lya en baillant, le regard dans le vague.

    - Waaah, c'est exceptionnel ! s'exclama Kû hilare, observant son amie qui avait du mal à avoir les deux yeux ouverts en même temps.

    - Mais … arrête de te moquer de moi, c'est pas gentil ! s'amusa néanmoins la jeune fille.

    - Mais tellement vrai ! lança Kaede qui devait apparemment aimer la taquiner.

     

    Lya choisit de ne pas répliquer. Après ce réveil, qui, avouons-le, commençait à devenir répétitif, elle finit par s'intéresser au programme, se souvenant enfin que la journée était libre et donc que rien n'était prévu.

     

    - Vous allez faire quoi, aujourd'hui ? demanda-t-elle.

    - On pense visiter les alentours de Kyoto. Tu veux venir ?

    - Ben oui, je ne sais pas quoi faire.

     

    Bon, eh bien le programme était là, il n'y avait plus qu'à s'y mettre. Comme la veille, Lya ne fit que des découvertes, n'étant jamais allée dans cette région. Le nombre de temples était impressionnant, et les filles ne purent en visiter qu'une infime partie. Elles mangèrent dans une petite auberge, la préférant aux restaurants bondés où on ne pouvait plus s'entendre parler. Là, au moins, elles pouvaient être en toute tranquillité … quoique, avec les 3-A, tranquille, c'était vite dit.

     

    La journée passa en un éclair. Elles ne s'étaient pas arrêtées très souvent dans la journée et, en fin de compte, étaient entrées dans pas mal de boutiques … le porte-monnaie avait bien évidemment pas mal servi.

    Lya partit ranger ses emplettes dans la chambre, puis retourna dans le salon avec pour objectif de se laisser tomber dans un fauteuil et de ne plus en bouger pour un moment. Mais ce fut un objectif – pourtant simple – qu'elle ne put atteindre, à cause de sa curiosité … parce qu'elle avait entendu la conversation entre Kaede et … quelqu'un au téléphone. De loin, ça avait l'air d'une conversation anodine, mais on aurait dit dans l'attitude de Kaede qu'elle essayait de calmer son interlocuteur. Kû et une autre fille, Mana, s'approchèrent d'elle. Enfin, la ninja raccrocha.

     

    - Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Mana.

    - Je ne sais pas, je n'ai pas tout compris. Yue a des problèmes, elle était avec Kazumi, le p'tit Negi et d'autres. Selon elle, il se passe des choses bizarres,et elle dit qu'elle a besoin d'aide. Il faudrait y aller.

     

    Lya s'en désintéressa de suite. Comment pourrait-t-elle être utile ? Elle avait toujours importuné tous ceux qui s'était trouvés près d'elle. Dans une situation comme celle-là, la meilleure solution semblait être de ne rien dire et de rester à l'auberge : elle n'avait pas spécialement envie de jouer au boulet.

    Puis un déclic se forma dans sa tête. Son amie avait prononcé le mot « bizarre ». Rien que ce mot lui fit penser à elle. Est-ce que le problème de Yue était lié à Lya ? Pire encore, c'était peut-être à cause d'elle que ça arrivait ! La jeune fille ne pouvait pas s'empêcher d'y penser. Malgré elle, elle s'approcha de ses trois camarades et s'adressa directement à sa colocataire

     

    - Des choses bizarres ? Tu crois que ça a un rapport avec moi, Kaede ? demanda-t-elle d'une toute petite voix, surprenant les trois filles qui croyaient être les seules à en parler.

     

    Les regards des trois filles se posa en même temps sur elle, ce qui l'impressionna, elle qui n'en avait pas l'habitude. Elle se sentit rougir, embarrassée. Mais elle se reprit.

     

    - J'ai entendu votre conversation et j'en suis désolée, mais je ne pouvais pas attendre sans rien dire.

    - Un rapport avec elle ? Qu'est-ce qu'elle veut dire ? demanda Mana, ne faisant pas partie de celles qui étaient au courant du passé de Lya.

     

    La fille aux cheveux noirs fut superbement ignorée par les autres, qui se concentraient davantage sur la question posée par Lya.

     

    - Je ne pense pas, mais même si c'était le cas, pourquoi veux-tu venir ?

    - Je suis sûre de pouvoir apprendre des choses sur moi ! Et puis, bon … si c'est de ma faute, j'aimerais bien essayer d'arranger les choses.

    - Si c'est le cas, on ne peut pas vraiment dire non, réfléchit Kaede.

     

    Lya poussa un soupir de soulagement. Elle avait persuadé ses amies de l'emmener, le plus dur était maintenant de comprendre ce qui se passait. Son cœur battait la chamade, un peu à cause de l'appréhension, mais aussi à cause de l'excitation.

     

    - Je ne comprends pas du tout, quelqu'un peut m'expliquer ? tenta vainement Mana.

    - On t'expliquera plus tard, on n'a pas vraiment le temps.

     

    Et c'est comme ça que Lya se retrouva dans le train, le soir, à courir après les évènements étranges qu'elle avait passé sa vie à essayer d'éviter … Ironique. Et bien loin de l'objectif qu'elle s'était fixé.


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  •  

    - Suano ! s'écria Lya, sans pouvoir cacher son inquiétude.

    - Alors c'était toi qui les avais prévenus, grogna Gira.

     

    Le bras droit d'Ukyo ne réagit pas, taciturne. La lueur sadique et malsaine qui brillait parfois dans ses yeux couleur métal avait disparu, pour laisser place à un regard froid et inexpressif. Son dernier échec devait franchement lui casser les pieds, et il avait certainement envie d'en finir au plus vite.

    Soudain, alors que Lya guettait son ennemi et se préparait à un combat qu'elle n'était pas sûre du tout de gagner, même avec l'aide de Gira, elle sentit un mouvement derrière son dos. Elle para vivement et s'éloigna, détaillant son nouvel adversaire au passage. Dans les vingt-cinq ans, l'homme portait ses étranges cheveux argentés aux reflets bleus jusqu'aux épaules, et avait d'intrigants yeux dorés.

    « Bah bien sûr, Suano ne suffisait pas ! », ragea la jeune fille, cernée.

     

    - Qu'est-ce qu'Ukyo veut à Lya ? gronda Gira, son visage arborant un masque de haine pure.

    - Eh bien, tu ne l'appelles plus « maître » ? ironisa l'inconnu, nettement plus jovial que Suano.

    - Suano, répond-moi ! s'écria Gira, reprenant brutalement sa forme démoniaque.

     

    Sa voix tremblait de fureur contenue, son corps parsemé de petits éclairs, tandis que ses yeux brillaient de rage, et ses pupilles fendues de démone ne faisaient que souligner sa colère. Lya était presque effrayée par son alliée, mais Suano restait de marbre, nullement impressionné.

     

    - Tu n'as pas besoin de savoir. J'ai toujours pensé que tu étais un rebut, qu'il faudrait éliminer au plus vite. Le maître semble s'en être enfin aperçu.

     

    Gira tressauta, piquée au vif. Avant de faire un louable effort pour se calmer. Le bras droit d'Ukyo cherchait certainement à lui faire perdre le contrôle en la provoquant, elle devait absolument rester froide. La démone avait quelqu'un à protéger, pour la première fois de sa vie. Lya était blessée, elle n'avait pas le droit de se laisser aller.

    Soudain, Suano fondit sur Gira, signal de l'attaque. L'inconnu, lui, se précipita sur Lya. Aussitôt, une violente bourrasque déstabilisa la jeune magicienne, qui faillit perdre l'équilibre à cause de sa cuisse blessée. Elle résista vaillamment, se défendit d'un coup de pied grâce à une barrière de glace, et lui lança des flèches du même élément. Son adversaire les dévia sans problème avec grâce à un sort de vent. Lya se rappela un instant les paroles de Katsu : « il avait aussi le vent pour élément, mais à un tel niveau … il m'a battu à plate couture. J'ai cru voir ma fin arriver, mais bizarrement, il m'a dit de rentrer. Il avait un message pour toi … c'est terrible … », puis il avait ajouté : « C'est Arianna … il l'a vaincue … ». La jeune fille comprit aussitôt dans quel pétrin elle s'était fourrée. Elle était face à l'homme qui avait vaincu son maître et Katsu ! La jeune magicienne ressentit aussitôt une grande colère, mais se contint. Comme Gira, elle aurait besoin de toute sa tête pour l'affronter. Même si elle était certaine de perdre, elle allait mettre toutes les chances de son côté, et sa fierté l'empêchait de se laisser faire sans se battre.

    Suano, lui, affrontait Gira et ne semblait pas faiblir. Les sorts de foudre pleuvaient sur lui, mais il les évitait ou les parait avec facilité. La démone, elle non plus, ne s'essoufflait pas, alimentée par sa colère et la nécessité d'en finir au plus vite. Elle aussi avait compris qui était l'adversaire de Lya, et savait bien que dans son état, la jeune japonaise ne pourrait pas faire grand-chose.

    Mais contre toute attente, Lya résistait assez bien. Sa blessure la faisait souffrir, elle sentait l'entaille pulser, elle haletait, mais elle refusait d'abandonner maintenant. Tout en esquivant, elle invoqua un nivis casus, qui n'eut pas beaucoup d'effet, puis un marteau d'Aquilon, qui se heurta aux mêmes défenses. Puis elle recommença à incanter.

     

    - Glacies et lux alas rubras protegant !

     

    L'inconnu asséna un coup de son talon sur sa gauche, elle para de justesse avec son avant bras, puis le repoussa violemment.

     

    - Veniant spiritus glaciales luces …

     

    Comprenant ce qu'elle voulait faire, son adversaire voulut l'en empêcher. Il feinta, passa ses défenses et l'envoya valser contre un arbre. Mais elle ne s'arrêta pas d'incanter, et fondit sur lui, malgré la douleur du coup que venait de prendre son dos.

     

    - Cum fulguris lucis flet tempestas nivalis !

     

    Elle réussit à attraper le bras de l'inconnu et à le bloquer.

     

    - Nivis tempestas lucis !!! hurla-t-elle alors que son ennemi tentait de se défaire de l'étreinte.

     

    La tempête, lancée à bout portant, projeta l'homme au loin, provoqua une énorme explosion et interrompit même un court instant le combat de Gira et Suano, alors que celui-ci prenait l'avantage. Et Lya s'effondra, sa cuisse refusant de la porter plus longtemps. Mais au moins, elle avait vaincu son adversaire. Gira n'avait plus qu'à s'occuper du cas de Suano, en espérant qu'il ne soit pas trop fort.

    Enfin, c'est ce que la jeune fille, encore consciente, croyait. Mais elle vit, malgré sa vision trouble, une silhouette apparaître à travers la fumée. L'homme, à peine blessé, se rapprochait d'elle à pas lents, savourant sa victoire. Un mince filet de sang coulait le long de son épaule, seule trace laissée par la tempête de Lya.

    Il la ramassa, alors qu'elle n'avait plus la force de se débattre, et l'assomma plus ou moins douloureusement, une lueur de joie malsaine dans ses yeux dorés.

    Pendant ce temps, Suano menait la vie dure à son adversaire. Gira comprit qu'il ne lui restait plus qu'une chose à faire. Elle n'avait plus la force de faire appel à ses techniques démoniaques les plus puissantes, ne pourrait pas vaincre et Suano, et l'autre. Malheureusement, il ne lui restait plus qu'une solution. Battre en retraite. En espérant que Lya survive jusqu'à ce que la démone puisse lui porter secours.

     

     

    ***

     

     

    Yoru, Illonya et l'équipage du "Great Paru", nom donné au vaisseau poisson rouge, ne savaient rien de ce qui s'était joué quelques heures plus tôt à des milliers de kilomètres d'eux. Ils volaient joyeusement dans le ciel azuré – enfin, joyeusement, ça dépendait. Haruna, Kazumi, Sayo et Kû avaient leur pêche habituelle, Illonya avait retrouvé la forme après une bonne nuit de sommeil, et Yoru discutait avec les autres, tentant de ne pas penser à l'absence de Lya.

    Ils se dirigeaient à présent vers Phoenicus en passant par Megalomesembria. Il restait à retrouver Yue, Nodoka, Anya, Camo, Lya, et plus problématiques parce que sans badges, les jumelles. Et puis Gira, aussi, mais aux dernières nouvelles, la démone était avec Lya.

    Ils arrivèrent à Phoenicus dans la soirée, après une certaine accélération. Cela faisait vraiment bizarre à Illonya, qui justement en venait. C'était là qu'elle avait découvert sa malédiction. D'ailleurs, elle hésitait à en parler à Yoru. Elle était tiraillée entre le besoin de se confier – et puis elle savait que Yoru garderait le secret – et la peur de sa réaction. Après tout, elle craignait que la prophétie ne l'amène à combattre Lya, et le jeune homme risquait de ne pas être très content, voire de devoir choisir entre son amie et sa dulcinée, dilemme que personne n'aimerait avoir à assumer. Non, elle n'en parlerait pas.

     

    Le lendemain, ils se dirigèrent vers Zephyria.

     

    - J'ai repéré un badge !

     

    Ils se précipitèrent tous tête la première sur le pont, Yoru en tête. Ça aurait pu devenir un gag, si seulement la situation n'était pas si sérieuse ...

    Ils eurent du mal à trouver le détenteur de la petite ailette blanche, car le signal menait dans des sommets enneigés, presque en pleine tempête. Mais il s'agissait de Camo, qui avait retrouvé le bâton de Negi et qui se tenait à l'abri de la neige, frigorifié.

    La petite équipe le ramena dans le vaisseau, puis reprit la route.

     

    ***

     

    Gira s'appuya sur un tronc, haletante. Elle devait aller encore plus loin. Rester consciente. Si elle était tuée maintenant, Lya n'aurait plus aucune chance de survivre. Et Gira mourrait sans savoir la vérité sur sa famille. Pendant longtemps elle n'avait pas voulu savoir, comme si elle en avait peur. Mais la quête de vérité de Lya l'avait comme réveillée. Elle ne pouvait pas rester sans savoir, ce n'était pas possible. Elle devait persévérer.

    La démone serra dans son poing un petit objet, ramassé pendant sa fuite. Le badge ala alba de Lya, tombé pendant le combat. Et dans sa poche se trouvait la photo d'Arianna, l'inconnue et la jeune fille, trouvée dans la maison de celle-ci.

    Les seuls objets que Lya avait laissés derrière elle avant d'être enlevée.

    Gira reprit son souffle quelques secondes et vérifia ses blessures. Celles-ci commençaient déjà à cicatriser, grâce à sa nature de démone, mais l'intense course qu'elle leur imposait ne facilitait pas le processus de guérison. Tant pis. Elle devait aller aussi loin que possible afin de reprendre des forces dans une relative sécurité.

    Elle vola, aussi vite et discrètement que possible. Longtemps. Elle avait arrêté de compter les heures à partir de la troisième, mais ça faisait bien longtemps que tous ses muscles criaient grâce. La démone finit par s'écrouler dans une clairière, au crépuscule, haletante.

    Il lui restait assez de magie pour placer des sorts d'alarme, ce qu'elle fit. Au moins, personne ne la trouverait par hasard.

    Gira s'endormit immédiatement après dans un sommeil sans rêves, duquel elle émergea deux ou trois heures seulement plus tard, presque aussi épuisée qu'avant. Mais au moins, sa magie était en partie revenue.

    Elle avisa le badge de l'ala alba, resté dans sa main depuis sa fuite. Il était légèrement abîmé, et quelque chose attira immédiatement son attention. Quelque chose dépassait. Quelque chose qui ressemblait vachement à un bout de puce électronique qui émergeait du badge.

    Une idée vint germer dans son cerveau. Tous les membres de l'ala alba possédaient ce badge. Et parmi eux se trouvait un robot, selon Lya. Alors si elle avait de la chance … la démone fit sortit de son sac un petit appareil, qui lui permettait de détecter tout appareil électro-magique et de le faire réagir par impulsions. Elle le mit en marche, et en effet, elle détectait un signal émis par le badge.

    Réfléchir. Elle devait réfléchir. Lya et elle avaient rendez-vous à Ostia avec le reste de l'ala alba. Donc elle pouvait imaginer que certains des compagnons de Lya y soient. Elle était à environ mille kilomètres d'Ostia. Si elle amplifiait la sensibilité de son détecteur, elle pourrait sans problème atteindre des badges à Ostia.

    Elle se concentra, puis projeta sa magie vers son appareil. Puis elle dirigea les recherches de son appareil à l'est, vers la grande ville. À son grand soulagement, quelques signaux identiques à celui du badge de Lya furent détectés ! La chance ne l'avait donc pas complètement abandonnée.

    Gira brancha à son appareil l'équivalent magique d'un téléphone – l'espèce d'écran dont se servait Thelis – et activa le système de son détecteur, qui servait à faire réagir les appareils détectés. Avec un peu de chance, le robot réagirait et établirait la communication …

     

    ***

     

    Negi se massait les tempes en pestant. En face de lui, Kotaro avait entamé un pétage de plombs en frappant le mur de son poing, et Chisame sentait venir un beau mal de crâne en perspective.
    Tout s'était à peu près bien passé depuis que l'ala alba avait été séparée. Bon, d'accord, Natsumi, Akira et Ako étaient devenues esclaves, devant rembourser une dette astronomique. Mais ils y travaillaient, ça allait s'arranger.

    Arrivé dans une forêt en compagnie de Chachamaru, Negi avait rapidement rejoint Chisame et Kotaro, et cela grâce à Chachamaru, qui pouvait détecter les ondes émises par les badges de l'ala alba sur un rayon de mille kilomètres. Ils avaient débouché dans la ville de Granicus, y avaient trouvé Kazumi, toujours accompagnée de Sayo. Mais après recherches, ils avaient appris qu'Ako était tombée malade, et Akira et Natsumi n'avaient eu d'autre choix pour la sauver que de compter sur un al-iksir extrêmement cher, qu'elles devaient rembourser. Elles étaient donc devenues esclaves. Negi y avait trouvé une solution. Participer avec Kotaro à un tournoi, et le gagner, car le prix couvrait tout juste la dette.

    Ce tournoi se déroulait à Ostia, un mois et demi plus tard, alors il fut convenu qu'ils feraient d'abord des combats à Granicus avant, pour gagner un peu d'argent et d'expérience. Restait le problème d'être reconnu par les autorités. Negi l'avait réglé grâce à des pilules données par Evangeline, qui modifiaient l'âge, les faisant paraître cinq ans plus jeunes ou plus âgés. Negi et Kotaro avaient donc commencé à combattre en tant que gladiateurs, sous la forme d'adolescents de quinze ans.

    Mais il avait fallu donner des pseudonymes. Kotaro avait choisi Kojirô Ôgami, et Negi avait eu l'idée de devenir très célèbre en prenant le nom de son père. Cela avait fonctionné, et à peine quelques jours plus tard, ils avaient reçu une lettre de Setsuna et Asuna, disant être à la recherche de Konoka.

    Negi et Kotaro enchaînaient les victoires, étaient partis pour Ostia, et avaient même eu des nouvelles de Makie et Yûna, qui n'avaient pas de badge. De plus, Chachamaru, Kazumi et Sayo avaient entamé un tour du monde pour retrouver tout le monde, le seul gros problème restant était de retrouver les jumelles, Illonya, Shelly et la fille qui accompagnait le groupe de la Norvège, qui n'avaient pas de badge.

    Bref, tout s'était à peu près bien passé.

    Alors pourquoi maintenant ? Pourquoi la chance les quittait-elle ? Pourquoi avait il fallu que des chasseurs de prime trouvent Lya et la fille aux cheveux roses dénommée Gira, et que deux autres combattants débarquent pour mettre tout le monde d'accord et pour finir d'achever Gira et Lya, enlevant cette dernière ?


     

    - On doit intervenir ! s'écria Kotaro, hors de lui. Elle a besoin d'aide, qui sait ce qu'il va lui arriver ?!

    - Oï, doucement, Kota, le tempéra Chisame. On ne sait pas qui sont ces personnes, ni où ils l'ont emmenée.

    - C'est vrai, continua Negi, et ça s'est passé à quelques centaines de kilomètres d'ici.

    - Alors quoi ?!  On reste ici, sans rien faire ?! Avec ta magia erebea, tu pourrais tous les latter !

    - Je n'ai jamais dit ça ! Dis que je ne fais rien, tant que tu y es !

    - C'est exactement ce que je dis ! On doit réagir, maintenant, sinon ce sera trop tard !!!

     

    Chisame, que ce duo commençait à exaspérer au plus haut point, sortit deux ananas de ses dernières courses, interrompues par la nouvelle de la capture de Lya. En effet, les deux kidnappeurs avaient fait diffuser la vidéo de l'attaque, en pleine ville, et avaient revendiqué être de Ragnarök, une première pour cette organisation qui s'évertuait à rester discrète, malgré la terreur qu'elle entretenait de temps en temps.

     

    - Vous ... allez ... VOUS CALMER, BANDE D'ABRUTIS SUREXCITÉS ?! s'écria-t-elle en leur balançant ses ananas à la figure.

     

    Ils s'arrêtèrent, stupéfaits. Negi, parce que Chisame l'avait déjà attaqué comme ça et ne pensait pas qu'elle recommencerait aussi vite, et Kotaro ... tout simplement parce qu'il ne s'était encore jamais pris d'ananas sur le coin de la figure. L'ananas, lui, ne savait pas s'il préférait être mangé, voir des dents déchiqueter sa chair, et voir son jus être aspiré jusqu'à la dernière goutte ... ou être utilisé comme arme pour arrêter deux abrutis en pleine dispute. Là, tout ce qu'il voulait, c'était de retourner à sa vie auprès de frangin ananas et sœurette ananas ... où il finirait par être mangé, avec ou sans sa famille. Mouais, de toute façon ses perspectives de carrière étaient assez limitées, autant qu'il finisse en arme de destruction massive. Ce serait plus original ...

     

    - Bon, maintenant, vous allez m'écouter, leur intima Chisame. Qu'est-ce qu'on peut faire ? Pas grand-chose. C'est vrai qu'avec sa magia erebea, Negi pourrait les vaincre. Et ça nous servirait à quoi ? On ne sait pas où ils l'ont emmenée. On ne sait même pas où a eu lieu l'enlèvement exactement. Par contre, ce qu'on peut faire, c'est tenter de contacter l'équipe partie à la recherche des autres. Leur demander de chercher son badge. Et de là, on pourra envoyer Negi.

    - Et comment on les prévient ? fit Kotaro, sarcastique.

    - Ça j'en sais rien, faut qu'on y réfléchisse. Mais nous enguirlander ne changera rien à la situation, au contraire.

    - Et cette Gira ? se demanda Negi après un moment de réflexion.

    - De quoi, Gira ? À quoi pense-tu ? l'interrogea Chisame.

    - Peut-être qu'elle sait quelque chose. En tout cas, quand je me repasse l'enregistrement, c'est ce que je me dis. Donc si on arrive à la contacter, ou qu'elle nous contacte d'elle-même ... connaissant Lya, elle a dû lui parler de nous.

     

    Ils réfléchirent à cette option, mais ça leur paraissait difficilement réalisable. Negi allait proposer autre chose quand son badge vibra étrangement dans le fond de sa poche.

     

     

    ***

     

     

    - Que fait Xyn ? demanda Theodora, rentrant dans ses appartements à Ostia après un rendez-vous officiel.

    - Je ne sais pas, répondit Fumika en haussant les épaules. Elle reste dans sa chambre, roulée en boule sur son lit, et elle ne veut pas parler.

    - Elle qui était toute contente de venir à Ostia ... renchérit sa soeur.

    - Je crois que je sais ce qu'elle a, affirma Ren.

    - Moi aussi, fit la princesse après un moment de réflexion.

     

    Les jumelles eurent le même haussement de sourcil, surprises. Cela aurait peut-être fait rire Theodora, si seulement la situation était moins grave.

     

    - Vous n'avez pas vu les infos, c'est ça ? soupira Ren.

     

    Il sortit l'équivalent d'un smartphone en version magique, et leur montra la vidéo.

     

    - Lya a été enlevée, conclut la princesse de Hellas. Je crois tout simplement que Xyn a peur pour sa sœur.

    - Mais ça ne rime à rien, s'énerva Ren. Qu'est-ce que Ragnarök lui veut ? Qu'est-ce que cette fille peut avoir de si capital pour eux ?

     

    Les jumelles ne répliquèrent rien, sous le choc.

     

    - Moi, je sais ... soupira la princesse, la mine sombre.

     

    Mais ils ne purent lui arracher aucun indice. Elle refusa tout simplement de parler, même à Ren qui était son protégé depuis plusieurs années. Theodora évoqua vaguement une ancienne promesse qui l'empêchait de parler, puis resta silencieuse.

    Ils se dirigèrent vers la chambre de Xyn, dans l'idée de rassurer la jeune fille. Ils furent donc très surpris de la voir sortir d'elle-même.

     

    - Theodora, commença-t-elle, penses-tu que ma grande sœur a une chance de revenir ?

     

    La princesse ouvrit la bouche, mais Xyn l'interrompit.

     

    - Honnêtement, je veux dire. Ne cherche pas à mentir pour me préserver.

    - Tu me connais mal, jeune fille, répliqua Theodora avec un pauvre sourire. Franchement, je n'en sais rien, Xyn. D'une certaine façon, elle a toujours eu une chance incroyable, Ragnarök a eu beaucoup de mal à lui mettre la main dessus. Peut-être qu'elle réussira à s'échapper. Pour l'instant ils ont besoin d'elle, mais c'est justement ce qui me fait peur.

    - Qui sait ce qu'ils pourraient lui faire ? compléta Xyn en murmurant.

     

    Elle inspira longuement. Puis serra quelque chose dans sa main et les dépassa, se dirigeant vers un petit jardin privé.

     

    - Attends ! s'exclama Ren en la rattrapant. Qu'est-ce que tu comptes faire ?!

    - Je vais m'entraîner.

     

    Theodora eut à nouveau un pauvre sourire, et pausa sa main sur l'épaule de Ren.

     

    - Reste avec les jumelles, lui demanda-t-elle. Je m'en occupe.

     

    Arrivée dans le jardin privé, Xyn ouvrit sa main et contempla une petite clé, qui soudainement grandit, longue d'une quinzaine de centimètres. Le principal était constitué d'un métal argenté, et deux lamelles de ce métal s'enroulaient autour d'une sphère bleue en suspension au bout de la clé. Theodora lui avait raconté un jour que sa sœur possédait un bâton, forgé en même temps et sur le même modèle.

    Cette clé et ce bâton étaient tout ce qui symbolisait leur lien naissant, lien qui ne demandait qu'à éclater au grand jour. Lien qui était menacé. Lien qu'elle devait protéger. C'était tout ce qu'elle pouvait faire. Protéger.

    Xyn s'assit en tailleurs, ferma les yeux et sa clé lévita presque aussitôt au dessus de ses paumes. Vu de l'extérieur, a priori, il ne se passait rien. Faux. Les changements étaient seulement invisibles. Peu à peu s'érigèrent plusieurs barrières sphériques. D'abord autour de la petite magicienne, puis atour d'autre objets, d'arbres, dans le vide. Elle faisait bouger ses protections. Les renforçait. Les affaiblissait. Les étendait. Les construisait autour d'oiseaux, suivait leur vol.

    C'était ce qu'elle était. Lya était une mage guerrière.

    Xyn était une mage protectrice.

     

    - Alors, que comptes-tu faire ? demanda doucement Theodora dès qu'elle eut fini.

    - Je ne suis pas si naïve. Je sais que dans l'immédiat je ne peux rien faire pour elle. C'est pour ça que je m'entraîne. Parce que quand elle reviendra, je la rencontrerai enfin. Et je ferai tout pour l'aider. Ma magie servira enfin à quelque chose.

     

    Le sous-entendu dans sa voix était clair. « Je t'en prie. Ne me retiens pas. ». Et Theodora hocha la tête d'un air entendu.

     

    _ _ _ _ _ 

    désolée pour le retard que j'ai pris, mais pas de connexion internet pendant une semaine, c'est fatal pour la publication ... Le 38 viendra bien plus vite que n'est venu le 37 ! J'en profite pour rappeler que je n'ai toujours aucun avis sur les résumés de chapitres ( ou au moins d'arcs ), donc si vous voulez, le sondage est ici !


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  •  

    « Tant pis … », soupira Lya. « Gira, je ne peux plus t'attendre ! ». La magicienne de glace bondit hors de sa cachette, faisant sursauter plusieurs de ses assaillants, et ne leur laissa pas le temps de faire quoi que ce soit.

     

    - Sagitta magica, series lucis !

     

    Puis elle profita que les magiciens étaient occupés avec sa trentaine de flèches de lumière, pour sortir sa carte.

     

    - Adeat ! s'exclama Lya, s'armant de cinq kunaïs. Glacies et lux alas rubras protegant !

     

    Elle lança ses armes au sein des chasseurs de primes, puis déclencha cinq nivis casus, qui recouvrirent l'endroit de neige, de cristaux de glace et de poussière en suspension dans l'air. Elle se précipita dans le brouillard causé par son sort, et utilisa l'entraînement de Gira pour assommer le plus d'adversaires possibles même sans les voir, tant qu'elle était encore dissimulée.

    Lorsque le sort se dissipa, huit ennemis étaient à terre : trois directement touchés par le nivis casus, projetés et assommés contre les énormes troncs, qui eux n'avaient strictement rien, et les cinq autres envoyés au pays des rêves par les coups armés de ki de Lya.

    Ses adversaires l'attaquèrent en masse, elle les esquiva sans problèmes, et contre-attaqua. Comme le disait Arianna, l'agilité faisait partie de ses points forts, et les magiciens en faisaient les frais. Mais, consciente que, même avec son entraînement chez Evangeline, son endurance ne lui permettait pas des combats trop longs et intenses en même temps, Lya décida d'en finir au plus vite.

    Ces chasseurs de prime travaillaient en deux groupes qui tentaient de la prendre en pince, l'un l'attaquant par devant et l'autre dans son dos, mais grâce à sa perception des auras et les ondes magiques qu'elle envoyait constamment pour vérifier la position de chacun, le second groupe ne lui causait pas plus d'ennuis que le premier.

    Soudain, alors qu'elle s'était montrée plutôt fuyante depuis la dissipation du nivis casus, elle fondit au milieu du premier groupe, attrapa le poignet d'un ennemi, l'immobilisa, renvoya un autre adversaire d'un coup de pied. Puis elle pivota, projeta celui qu'elle tenait sur un attaquant et atteignit dans le même temps le flan d'un autre avec son pied qu'elle n'avait toujours pas posé. Dix flèches de lumière incantées silencieusement en cueillirent d'autres, les repoussant.

    Le second groupe ne pouvait pas intervenir, trop nombreux, et certains chasseurs retombaient au sol, assommés. Depuis le début, quatorze ennemis étaient à terre, mais les autres avaient une bonne défense. Une lame de lumière atteignit Lya à la cuisse droite, elle riposta avec des sagitta magica. Cependant la blessure l'affaiblit et entrava ses mouvements, l'obligeant à reprendre ses esquives. La jeune magicienne réussit à incanter un nebula hypnotica dans le feu de l'action. Elle le lança, mais un ennemi, avec de bons réflexes, dévia le brouillard hypnotique avec un vente, et seuls deux magiciens furent touchés.

    Lya commençait à s'essouffler, plus épuisée qu'elle ne le pensait par ses heures de vol. Gira mettait beaucoup plus de temps que prévu, et si la démone n'arrivait pas vite, la jeune fille serait vite submergée.

    Soudain, elle entendit une explosion, un panache de poussière s'éleva au-dessus des arbres pourtant énormes, et des cris retentirent. Puis le corps d'un magicien assommé passa à travers d'épais buissons et acheva son vol plané sur un des ennemis de Lya, l'empêchant d'attaquer. Celle-ci soupira de soulagement, car elle n'aurait pas réussi à esquiver l'homme.

    Un autre homme passa les buissons – mais celui-là le fit sur ses propres jambes – et semblait terrifié.

    Lya profita de la surprise de ses propres attaquants pour passer à l'offensive encore une fois, et réussit à en piéger quelques uns avec un Crystallizatio tellustris, qui gela la terre et les emprisonna dans la glace.

    Épuisé, elle ne vit pas un magicien l'attaquer par derrière. Mais celui-ci n'eut pas le temps de la toucher. Une ombre noire surgit dans le dos de Lya, arrêta les flèches magiques, et assomma l'homme.

     

    - Gira … soupira Lya, soulagée.

    - Ça va ? s'inquiéta la démone

    - Pas trop … mal. En fait, ce serait parfait … si on n'avait pas … une douzaine … d'ennemis … sur les bras ! s'exclama la jeune magicienne, le souffle saccadé.

    - Je crains que quelqu'un les ait prévu de notre position exacte … murmura Gira en faisant perdre conscience à un ennemi.

    - Mais qui ? demanda Lya entre deux esquives gênées par sa jambe blessée.

    - Aucune idée … répondit l'espionne, débarrassant la jeune fille de son adversaire trop insistant.

     

    Ne restaient que trois chasseurs de prime, hésitants. Gira allait finir le travail quand soudain les deux jeunes filles sentirent une nouvelle présence. Celle que Lya avait sentie avant de commencer le combat. Une aura sinistre.

    Tout à coup, Lya bondit sur le côté, en ignorant la douleur de sa cuisse, et évita une dizaine de flèches de feu. Quoique "éviter" était un grand mot : l'une d'elles avait frôlé et légèrement brûlé son bras droit.

    Lya reconnut immédiatement le nouvel ennemi, un homme aux courts cheveux gris-noir. Il venait d'assommer – ou de tuer, mais Lya n'avait pas spécialement envie de le savoir – les trois chasseurs de prime restants.

     

    - Suano ! s'écria-t-elle, sans pouvoir cacher son inquiétude.

     

     

    ***

     

     

    Illonya se réveilla à l'aurore, légèrement anxieuse. Ce jour-là, non contente de voir un des animaux du monde magique les plus dangereux en vrai, un dragon, elle allait devoir le combattre et ramener sa corne, l'empêchant de sévir dans la région. Mais sa tension disparut bien vite, pour laisser place à la concentration. Elle avait près d'une semaine d'entraînement intensif derrière elle, elle s'en sortirait.

    Elle vérifia son niveau d'énergie par une courte méditation, craignant que ses longues journées de vol aient mis à mal ses réserves de magie. Elle se sentait en pleine possession de ses moyens mais il valait mieux vérifier : contre un dragon, la moindre parcelle d'énergie serait utile.

     

    - Je suis prête, annonça Illonya. Shelly, je préfère que tu restes loin de ce dragon, donc tu m'attendras ici, le temps que je m'occupe de son cas.

    - On reste en contact, alors, lui imposa son familier.

    - Bien sûr. On gardera la télépathie tout le temps que je passerai à combattre ce dragon, si ça te rassure.

     

    La chatte-fée acquiesça silencieusement, anxieuse. Elle n'aimait pas ce qui était en train de se passer, mais elle savait bien que c'était nécessaire pour rejoindre Ostia en temps et en heure. C'était aussi important pour le mental d'Illonya, elle devait se prouver à elle-même qu'elle était capable d'être une bonne magister magi, même avec le boulet qu'était sa malédiction.

     

    - Toi aussi, Derek, lui intima Illonya.

     

    La norvégienne se leva, et laissa son ami magicien effacer les traces du campement pour elle. Puis elle fut apparaître son bâton. La stagiaire grimpa dessus et s'envola, tandis que son familier la regardait s'éloigner d'un air inquiet.

     

    Illonya commença à voler autour du village souvent attaqué, à la recherche d'indices, qui pourraient la mettre sur la piste du dragon. Elle trouva des traces au bout d'un long moment, sans savoir de quand elles dataient ; des empreintes qui appartenaient à un énorme animal. De là, la magicienne décida de faire confiance à son don.

    Elle ferma les yeux, sondant l'endroit. Elle perçut aussitôt la signature magique, reconnaissable, d'un dragon. Cette signature datait de la veille, ce serait exploitable. Illonya fonça, suivant l'aura de la créature.

    Elle vola une heure ou deux, fit une pause pour manger, puis reprit les recherches. Après un long vol, elle sentit qu'elle se rapprochait du monstre. Lorsqu'un rugissement retentit, la stagiaire s'arrêta et se percha sur une grosse branche. Le terrain de chasse du dragon devait se trouver par là, et elle attendit. Elle le sentait s'approcher.

    En quelques secondes, l'énorme reptile fut là, et passa en trombe devant elle. Il était impressionnant de voir ce monstre se frayer un chemin à travers les troncs gigantesques, suffisamment espacés. Mais elle n'était pas là pour ça. Heureusement, les cours très complets de l'académie de Lordania avaient aussi abordé les dragons, et elle reconnut immédiatement l'espèce : un dragon-tigre. Ce n'était pas un des plus grands dragons, au contraire, celui-là plafonnait à cinq ou six mètres, contrairement aux dragons noirs qui atteignaient facilement la dizaine de mètres. Mais en dehors de son nom, elle n'avait pas beaucoup d'informations. Elle se souvenait qu'il était agile et rapide, c'est tout. Elle devrait faire avec …

    Elle bondit à sa suite, et au moment même où l'animal sentait sa présence, elle le visait avec un magna cataracta.

    Sauf que le sort ne le toucha pas.

    Non.

    Parce que ce dragon ne se contentait pas d'être rapide et agile. Il maîtrisait aussi la magie. Et un bouclier venait de le protéger.

    Le monstre pila net et se retourna en rugissant. Ses cornes pointant vers l'arrière s'illuminèrent, traversées par des éclairs blanc-bleu. Et un fulguratio albicans s'abattit sur la barrière d'Illonya, érigée à la dernière seconde.

     

    - Génial, un dragon magicien … marmonna Illonya.

     

    Bon, forcément, il fallait absolument qu'elle tombe sur ce genre de dragon … à la magie de foudre qui plus est. Il allait falloir faire avec. Une fois encore, elle devrait se limiter le plus possible aux sorts de feu, sa magie aquatique risquant de l'électrocuter au passage. Mauvaise idée, n'est-ce pas …

    Elle esquiva un coup de griffe, s'éloigna, et testa la barrière du monstre avec une série de flèches magiques de feu. La magie protectrice ne vacilla pas une seconde, et l'animal s'envola à nouveau pour attraper la proie insignifiante qui s'agitait sous son museau.

    Illonya vola en zigzaguant entre les arbres, esquivant habilement la gueule pleine de crocs, la queue et les sorts de foudre de l'animal, cherchant à élaborer une stratégie. Puis elle fit brutalement volte-face, et tourna brusquement pour éviter le monstre.

    Elle essaya plusieurs sorts, contourna le monstre, tenta de nombreux angles d'attaque, voulut le surprendre. Malheureusement, la barrière du dragon était sphérique et fonctionnait pratiquement en autonomie par rapport à l'animal … ce n'était pas en le prenant par surprise que sa protection se fissurerait.

    Il fallait qu'elle soit plus inventive. Qu'avait-elle remarqué en le testant ? Le dragon attaquait d'abord physiquement, et lançait des foudres blanches lorsque Illonya se montrait trop offensive. Un plan commença à germer dans son esprit. Il attaquait avec la magie quand elle lançait trop de sorts ? Ben elle allait se faire plaisir.

     

    - Aqua et ignis unisonent ! Apes igniferae ! s'exclama Illonya.

     

    Aussitôt, une quinzaine d'invocations de feu, ressemblant à des abeilles d'un petit mètre de hauteur, fondirent sur le bouclier, de tous les côtés. À son contact, elles explosèrent, et la stagiaire profita de la fumée pour brouiller les sens du dragon et se rapprocher.

     

    - Emittam ! hurla la jeune magicienne en posant sa main sur la barrière.

     

    Elle s'éloigna immédiatement, alors qu'une nouvelle explosion détonait, plus importante, issue de son flagrantia rubricans en incantation à retardement.

    Les cornes du dragon agacé se chargèrent d'électricité. Ce fut le moment que choisit Illonya pour lancer une unique flèche d'eau au point exact que la flamme pourpre venait de fraper. L'animal lança un fulguratio albicans. La foudre passa la protection pour attaquer Illonya. Mais la flèche d'eau conduisit l'électricité, ce que l'animal ne pouvait pas savoir, et la barrière, fragilisée, se brisa.

    Illonya fondit alors vers le dragon et activa une autre incantation à retardement, un captus flammeus, pour capturer le dragon. Un tourbillon de feu l'entoura, mais le monstre réussit à se libérer. Elle ne put pas le prévoir. Et fut touchée par sa foudre blanche.

    Elle tomba à terre, et le dragon-tigre se rapprocha à une vitesse fulgurante. Mais elle refusa d'abandonner. Pas maintenant. Elle réussit à se redresser, un genou à terre. Au moment ou la gueule pleine de crocs s'abattait sur elle, elle entoura sa jambe d'une flèche de feu et bondit.

    Son sort la propulsa en avant, elle réussit à se réceptionner avec une roulade improvisée, comme elle avait souvent vu Lya le faire lors d'entraînements. Comme elle le pensait, utiliser l'énergie explosive de sa flèche l'avait envoyée bien plus loin et vite qu'un simple quick move, mais elle ne la maîtrisait pas très bien.

    Elle regarda autour d'elle, son pouls dépassant la limite du raisonnable. Elle n'était pas à son avantage, ici. C'était le terrain de chasse du dragon-tigre, alors qu'elle, paradoxalement, elle se sentait à l'étroit. Son terrain à elle, c'était le ciel. Le dragon le maîtrisait ? Eh bien elle aussi.

    Illonya fusa vers le ciel sur son bâton, passa la cime des arbres. Le monstre la suivit dans le ciel écarlate, déployant ses ailes dans toute leur splendeur.

     

     

    ***

     

     

    Dans un coin désert du vaisseau en route pour Tempe, Yoru tuait le temps et surtout l'anxiété en mâchonnant une barre chocolatée. Kazumi avait bien envie de le bouffer – lui, pas la barre chocolatée – parce que son humeur n'allait pas tarder à déteindre sur le petit groupe, mais en même temps elle le comprenait. Cela faisait déjà plus d'un mois qu'il était séparé de Lya sans pouvoir la voir, lui parler, la faire rire, la câliner, la rassurer. Ni même savoir où elle était. Savoir si elle allait bien. Si elle n'avait pas été vaincue par Ragnarök. Si elle était encore vivante.

    Il le supportait de moins en moins.

     

    - Badge repéré ! s'exclama soudain Chachamaru à côté de lui.

     

    Kazumi invoqua son artefact et Sayo bondit sur le robot qui lui était réservé, filant hors du vaisseau à toute vitesse.

    Yoru espéra de toutes ses forces que le badge en question était celui de sa Lya, et Kazumi posa sa main sur son épaule. Mais ça ne l'apaisa pas. La seule personne à pouvoir le faire n'était pas là. Peu de temps après, la voix de Sayo retentit par l'intermédiaire d'un des robots espions, resté avec Kazumi.

    Le jeune homme tressauta.

     

    - Alors ?! C'est qui ?! s'exclama-t-il.

    - Hey, doucement, le surexcité, lança la reporter. Laisse Sayo parler, sinon tu ne sauras jamais qui c'est !

    - Kazumi ! s'écria le fantôme, tout excité. Tu ne vas pas le croire !

    - Quoi ? répliqua la reporter, excédée. Tu vas me dire que le hasard a bien fait les choses, et que c'est Lya ? Que Yoru va enfin se calmer ?

    - Non ! C'est Paru ! Et elle a un vaisseau !

     

    Kazumi faillit perdre l'équilibre, et Yoru en oublia sa déception l'espace de quelques secondes.

     

    - … Attends attends attends … tu peux répéter ? fit la journaliste, ahurie.

    - Paru a réussi à se payer un vaisseau en dessinant et vendant des tableaux !

    - Un superbe bateau de type poisson rouge, renchérit Haruna comme si elle cherchait à vendre le vaisseau, vantant ses qualités. Canon à sagitta magica, cabines, cuisine, excellente propulsion, et discrétion assurée !

     

    La journaliste, qui avait comme qui dirait pris les commandes du groupe, réfléchit quelques secondes, puis annonça d'un air enthousiaste :

     

    - OK, on se rejoint à la prochaine escale et on continue les recherches avec !

     

    Sayo coupa la communication, et ils regardèrent le paysage défiler à travers un hublot, silencieux.

     

    - Yoru, tenta de le rassurer Chachamaru, les chances qu'on retrouve Lya sont fortes. Elle combat bien et a un badge.

    - Mais ?

    - Je m'inquiète davantage pour Illonya, qui ne fait pas officiellement partie de l'ala alba, et qui n'a aucun badge.

     

    Yoru hocha la tête, conscient qu'il s'inquiétait peut-être un peu trop pour sa petite amie et pas assez pour la jeune norvégienne. Il ré-attaqua sa barre chocolatée en espérant oublier sa déception. En plus de sa peur.

     

    Les heures passèrent, et Kazumi, Chachamaru et Yoru arrivèrent à Tempe où les y attendaient Haruna et Sayo. Le navire de la dessinatrice, qui deviendrait par la suite celui de l'ala alba, était d'un bel incarnat flamboyant, avait plus ou moins la forme d'un poisson rouge, et possédait même un pont comme sur la raie manta de Thelis. Ils embarquèrent tous à l'intérieur, et Yoru se posta à un hublot.

    Il était très tenté de faire un somme, mais de un il ne voulait rien rater des recherches, et de deux il était persuadé qu'il rêverait de Lya, comme cela arrivait depuis quelques temps, et le retour à la réalité serait bien dur …

    Le soir arrivait, et Chachamaru allait commencer à chercher un endroit où arrimer le vaisseau pour la nuit. Soudain, des explosions retentirent au loin.

     

    - On devrait contourner l'endroit, réfléchit Kazumi, alarmée. Si les autorités ou des chasseurs de prime sont là …

    - Attends, je pars en éclaireur, décida Yoru.

    - Ne prends pas de risques inutiles, abruti ! répliqua Haruna.

    - Laissons-le y aller, démentit Kazumi. Au pire, ça lui fera de l'entraînement, je doute qu'un ou deux chasseurs de prime lui posent vraiment de gros problèmes. Et puis un de mes robots espions le suivra.

     

    Yoru lui adressa un signe de reconnaissance et sortit sur le pont avant de sauter dans le vide et de descendre avec ses tourbillons de ki. Il avait besoin de se défouler.

    Les lieux de l'explosion étaient à une ou deux dizaines de kilomètres. Le jeune homme, qui avait repris son âge normal grâce à une pilule rouge, allait s'en rapprocher, quand il entendit une petite voix qu'il connaissait l'appeler.

     

    - Yoru ! Par ici !

     

    Une chatte-fée sortit de derrière des buissons, suivie par un homme.

     

    - Shelly ?! Qu'est-ce que …

    - Yoru, j'ai besoin de ton aide.

    - Vas-y, je t'écoute.

    - Illonya affronte un dragon en ce moment ! s'exclama la chatte-fée. Est-ce que tu peux aller vérifier si elle s'en sort bien ? On est en lien télépathique, mais elle est trop fière pour me dire franchement si elle a besoin d'aide.

     

    Yoru hocha la tête, mais avisa l'inconnu.

     

    - Ne t'inquiète pas, répondit Shelly à sa question muette, c'est un allié.

     

    Le jeune homme n'ajouta rien et partit en quick move. Il avait eu raison de partir en éclaireur, dis donc …

    Il fonça. De nouvelles explosions retentirent, et il redoubla d'efforts pour arriver à temps. Il arriva dans une petite portion de forêt à moitié brûlée. Éclairée par une trouée dans les arbres. Il grimpa en quick move dans l'un d'eux. À une centaine de mètres, il aperçut son amie norvégienne affronter un dragon trapu mais agile.

    De loin, Illonya semblait épuisée mais il n'intervint pas. Comme le disait Shelly, Illonya avait sa petite fierté. Comme Lya. Il attendrait un peu.

    Yoru s'approcha néanmoins pour pouvoir mieux observer et réagir si besoin.

    C'était inutile.

    Lorsqu'il arriva à une distance suffisante, Illonya fondit sur le dragon en évitant un sort de foudre, debout sur son bâton. Puis elle bondit au dessus de la tête du monstre, laissant son bâton foncer plus loin. Elle entoura sa jambe de sagitta magica de feu. S'appuya sur l'une des cornes du dragon. Et déclencha son quick move explosif.

    La corne se brisa net et partit se ficher dans l'herbe.

     

     

    ***

     

     

    Illonya appela son bâton et atterrit sur l'herbe, épuisée. Le dragon rugit de douleur et s'envola, visiblement apeuré. Shelly avait bien raison, briser une des cornes suffisait.

    Elle avisa la corne plantée dans le sol. Il lui suffisait de la ramener au village pour recevoir sa prime … courage, elle devait se relever ! Elle avait fini, bientôt elle pourrait retrouver Shelly et la rassurer. La stagiaire était persuadée que son familier était mort d'inquiétude.

    Une main se présenta à elle pour l'aider à se relever, et elle la prit machinalement. Avant de s'apercevoir qu'elle aurait dû être seule et que ce n'était pas normal. Illonya faillit enguirlander Derek pour l'avoir suivie, lorsqu'elle vit qui l'aidait.

     

    - Yoru ?!

    - Yep, fit le jeune homme, enthousiaste. Ça fait du bien de te revoir saine et sauve !

     

    La jeune fille commença à trembler.

     

    - Quoi, qu'est-ce qu'il y a ?! s'alarma Yoru, surpris. Tu te sens bien ?

     

    Le stress, la douleur, la peur, le besoin de retrouver ses amis, la surprise, le soulagement aussi, toutes les émotions de la jeune fille prirent brusquement le contrôle et elle se réfugia dans les bras de Yoru, en larmes.

     

    - Doucement, murmura-t-il en lui caressant la tête, comme il le faisait parfois avec Lya. Ça va, je suis là maintenant. On est là.

     

    Il la laissa se calmer, soulagé de la retrouver saine et sauve alors qu'elle n'avait pas de badge pour être repérée.

     

    - Kazumi, appela-t-il par l'intermédiaire du robot espion qui le suivait. Vous pouvez venir, il n'y a plus de danger.

    - Attends, Yoru, fit Illonya, on doit aller chercher Shelly et Derek, un …

    - Un allié, je sais. C'est Shelly qui m'a prévenu.

    - Il faut aussi ramener la corne au village.

    - Ne t'inquiète pas, Paru a un vaisseau, elle va les récupérer. On peut faire confiance à Derek ?

    - Je crois que oui. Mais je ne lui ai rien dit sur nos plans de retrouvailles. Il sait que je vais à Ostia, c'est tout.

    - D'accord, on va le garder dans le flou pour l'instant. Et nous, on va ramener la corne.

     

    Illonya la fit léviter avec ce qui lui restait de magie, la corne étant assez grosse. Par contre, ses jambes refusèrent de la porter plus longtemps, alors Yoru la prit sur son dos.

    La stagiaire lui indiqua la route, et il partit en quick move une fois de plus, faisant bien attention de ne pas être trop brusque pour son amie, tandis que la corne les suivait docilement.

    Lorsqu'ils arrivèrent au village, Illonya réussit à se relever, et c'était tant mieux, car Yoru ne pouvait pas l'accompagner : il avait son apparence normale, et risquait d'être signalé, mais la jeune fille, elle, était rousse, grâce à Shelly. Les villageois, septiques à cause de son âge, lui donnèrent la prime, puis elle repartit et rejoignit Yoru.

    Il la reprit sur son dos, s'apercevant que sa démarche n'était pas bien vaillante.

     

    - Merci, fit-elle en baillant un bon coup. J'ai un gros coup de barre et je tremble de partout, ça m'agace …

    - C'est normal. Il faut que tu te reposes, tu t'es bien battue. Tu n'es pas blessée au moins ?

    - J'ai juste pris un fulguratio albicans, mais ça va …

    - Tu as des traces de brûlures, il faudra soigner ça, répliqua Yoru, catégorique.

     

    Très vite, le vaisseau poisson rouge vint les récupérer. Yoru ramena la jeune norvégienne dans une des cabines et la laissa se changer en paix avant de revenir vérifier qu'elle allait vraiment bien, à part ses quelques brûlures.

     

    - Alors, on a retrouvé qui, pour le moment ? s'enquit-elle alors que Yoru lui pansait une partie du bras droit en dépit de ses protestations.

    - Kazumi et Sayo ne m'ont pas expliqué grand-chose encore, mais apparemment, il y a Negi, Kotaro, Chisame. Il y a aussi Ako, Akira et Natsumi ; et Asuna, Setsuna et Nodoka nous ont contactés. Chachamaru et Haruna sont dans le cockpit du vaisseau, et Kû doit être en train de manger quelque chose. D'ailleurs, tu veux que je te ramène de quoi reprendre des forces ?

     

    Illonya acquiesça, reconnaissante. Elle avait renoncé à le convaincre de ne pas s'occuper d'elle. Au moins, ça le distrayait et il ne pensait pas à Lya pendant ce temps-là.

    Mais Derek et Shelly pénétrèrent dans la cabine à leur tour, coupant l'herbe sous le pied du jeune japonais : ils – enfin Derek – lui avaient fait des sandwichs et les lui apportaient.

     

    - Et moi, je me débrouille, c'est ça ? lança Yoru en riant.

    - Tu rêves, s'exclama Illonya, je ne vais jamais manger tout ça !

    - Ah bon ? répliqua innocemment son familier. Bah tant pis, on aura pas pu apprécier les talents culinaires de Yoru.

    - Tsss … C'est ça, moquez-vous, en attendant, vous ne savez pas ce que je peux faire !

     

    Ils éclatèrent tous de rire, et continuèrent à se charrier les uns les autres.

    Le vaisseau s'arrêta pour la nuit, camouflé par des arbres, puis la petite équipe se répartit les cabines et les tours de garde.

     


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