• Chapitre 9 : Artefact et ... soirée

     Le dernier match commençait, dans l'excitation générale. Depuis le banc des participants, puisque Kuneru l'avait voulu, Lya observait Kazumi, présentant les deux finalistes qui allaient bientôt arriver sur le ring. Pour faire dans le conventionnel, comme à son habitude, Kuneru se matérialisa derrière la présentatrice, la surprenant au passage. Quand à Negi, il se montra plus normal, empruntant le petit pont comme tout le monde.

    Dès le « Fight ! » marquant le début du combat, le grand magicien sortit sa carte de pactio. Les livres l'entourèrent, comme dans le match contre Kaede. Puis il s'adressa à Negi, jetant au passage un petit coup d’œil à Lya. Celle-ci parvint à entendre des bribes de la conversation. Elle n'en croyait pas ses oreilles. Kuneru était l'un des amis de Nagi Springfield ! Il se nommait en vérité Albireo Imma … Elle avait déjà entendu ce nom … Mais où ?

    Il saisit un des livres, y mit un marque-page puis l'en retira. Une lumière l'entoura le magicien, puis disparut. Il ne reprit pas son aura bouillante comme la dernière fois. Au contraire, il respirait le calme et la maîtrise de soi. Un homme ressemblant vaguement à M. Takahata apparut en lieu et place de Kuneru. Lui aussi rappelait quelque chose à Lya … Mais elle ne savait pas quoi.

    L'homme rassembla son énergie, sauta, et frappa. C'était la même technique que celle de Takahata ! Mis à part qu'il utilisait plusieurs coups en même temps. Tout les tirs atterrirent dans l'eau. À croire que c'était juste pour impressionner Negi … et le public avec. C'était réussi.

    La poussière entoura la scène, mais Lya sentit la magie de l'artefact de Kuneru opérer. Le magicien changea plusieurs fois d'aura. Une phrase lui revint en tête, et elle sursauta. « Gatô est mort » … Elle venait d'entendre ce nom de la bouche de Kuneru ! Gatô … était-ce l'homme qui était apparu ? Mais s'il était mort, pouvait-il vraiment apparaître comme ça ?

    La poussière se dissipa, et Kuneru réapparut dans la forme qu'il adoptait de puis le début du tournoi. Si Lya avait bien compris, cet artefact permettait de prendre l'apparence et les capacités d'autres personnes … D'après ce qu'elle avait vu, le magicien n'en avait pas tellement besoin, alors que comptait-il faire avec cette carte ? Si la personne copiée était plus forte, il ne disposait alors que de dix minutes, mais il déjà très fort …

    Lya ne comprenait pas bien … jusqu'à ce qu'il parle d'une demande. De la part d'un de ses amis.

     

    - Si l'occasion m'était offerte, je devais transmettre de sa part quelques mots au fils qu'il avait perdu de vue.

     

    Il se retourna vers la tribune des candidats, son regard croisant celui de Lya.

     

    - Et à la fille de deux de ses amis, ajouta-t-il.

     

    Elle tressaillit. Comment ça ?! Lya jeta un coup d’œil derrière elle. Il n'y avait personne.

     

    - Kaede, c'est pas à moi qu'il parle, quand même !

    - Je dirais que si.

     

    Lya ne dit pas un mot de plus. D'accord. Tout allait bien. Alors comme ça, ses parents connaissaient le père de Negi. Un grand magicien. La normalité absolue ! Parfois, elle se disait qu'avec la vie qu'elle menait, elle ne pourrait plus s'étonner. En fait, si, elle arrivait encore à être surprise dans ce monde de fous.

    Kuneru tenait dans sa main un livre dont le titre était Nagi Springfield.

     

    - Tu es prêt, Negi ? Tu n'auras que dix minutes … Et je ne pourrais pas le refaire.

     

    Une intense lumière commençait à apparaître. Negi demanda si c'était Kuneru qui l'avait sauvé six ans auparavant, lorsque son village avait été envahi par des démons. Mais ce n'était pas lui. Nagi était donc en vie … l'éclat s'intensifia, aveuglant tout le monde.

    Il disparut enfin. Laissant place à un homme à la cape déchirée. La capuche retomba en arrière, découvrant des cheveux roux parsemés de mèches noires. Cet homme ressemblait tellement à Negi … « Nagi n'est plus là » … les larmes coulèrent sur le visage de Lya sans qu'elle s'en aperçoive. Elle connaissait cet homme … et lorsqu'elle le regardait, un sentiment de tristesse l'envahissait. Elle avait la sensation d'avoir perdu quelque chose d'essentiel, de capital. Qu'elle ne pourrait remplacer. Des mots franchirent ses lèvres sans qu'elle le veuille. Elle avait le sentiment de ne plus être elle-même.

     

    - Nagi … tu es là … murmura-t-elle en reniflant.

    - Tu as dit quelque chose ? demanda Ku.

     

    Lya sembla enfin prendre conscience de ses pleurs et de ses mots. Elle nia, séchant ses larmes qui ne voulaient pourtant pas s'arrêter. Heureusement, la chinoise ne fit aucun commentaire là-dessus.

    Sur le ring, Negi pleurait, lui aussi, de joie certainement. Même si ce n'était que pour quelques minutes, il avait enfin retrouvé son père … Il se jeta dans les bras de Nagi … enfin tenta. Parce que son paternel le repoussa d'une pichenette, cassant tout le côté émouvant. Sous prétexte que son fils ne devait pas pleurer. Non, en fait il arrivait à s'étonner que son garçon pleure pour si peu. Oui, vous avez bien lu. Pour si peu.

    Puis il se tourna vers les tribunes des participants, exactement comme Kuneru un peu plus tôt.

     

    - Toi aussi, Lya ? Ça m'étonne de toi, fit-il en riant.

    - Raaah !!! s'exclama-t-elle, en larmes, offrant un demi-mensonge. Te moques pas de moi ! Je ne sais même pas pourquoi je pleure, je ne sais même pas pourquoi je te tutoie, je ne sais pas ce qu'il m'arrive …

     

    La vue de cet homme éveillait en elle des scènes brumeuses, des phrases retentissaient dans son esprit. Elle voyait des explosions, au loin, en transparence avec ce qui se déroulait vraiment dans le tournoi. Puis des gens revenaient vers elle. Elle ne pouvait voir leurs visages. « S'il y avait un autre moyen, nous l'utiliserions … Mais tu sais bien que c'est impossible » … « Pour nous, c'est trop tard … Nous devons continuer. Mais pas pour toi. Tu as encore de nombreuses choses à voir, à apprendre ».

    Devant elle, Nagi invitait son fils à se battre. C'est vrai … c'était une finale de tournoi, après tout.

     

    - C'est tout ce que je peux t'offrir, dit-il.

     

    Le cœur de Lya rata un battement. « C'est tout ce que nous pouvons t'offrir » … Si Nagi continuait à lui rappeler son rêve, ça promettait vraiment d'être lacrymal … quoique ça l'était déjà. Elle sécha à nouveau ses larmes, observant la rencontre en silence.

    Negi s'élança, tenta quelques coups mais fut facilement paré. Son opposant le rejeta, et il essaya d'esquiver les frappes suivantes, tentative plus ou moins réussie.

    Les deux combattants utilisaient des sagitta magica. Mais comme on pouvait s'y attendre, Thousand Master prenait clairement l'avantage, ses coups magiques étaient bien plus forts. Il frappa plusieurs fois, les deux opposants s'envolant dans le ciel.

    Puis Nagi lança une puissante sagitta magica, ne se contentant plus d'en entourer son poing. Le tir partit dans l'eau, pas celle autour du ring mais celle de la rivière à côté, y explosant. Negi réussi tout de même à l'esquiver, projetant son propre sort contre celui de son père pour se repousser. Les gens sur le ferry d'à côté devaient être surpris. Très surpris, même. Et au passage, ils venaient de prendre une bonne douche, éclaboussés comme ils étaient. Ah, les gens sur le pont aussi. Et tant qu'on y était, les spectateurs du tournoi, dont accessoirement Lya. Ben tiens, avant, elle ne savait pas ce qu'elle ferait après les matchs … là, elle avait bien une petite idée. Elle irait se changer.

    Les deux adversaires échangèrent de nombreux coups dans le ciel, où la majorité des spectateurs ne pouvaient rien voir. Bon, là c'était raté pour le net, mais ce n'était pas le moment d'y penser.

    Negi tombait en chute libre. Il eut la bonne idée d'appeler son bâton. Puis il s'élança avec, mais fut repoussé. Malgré toute la bonne volonté du monde, il ne pouvait tout simplement pas rivaliser avec son père. Les deux finalistes redescendaient progressivement vers le ring, tout en poursuivant les attaques.

    Le coup final arriva. Une sagitta magica jeta Negi au sol. Épuisé, il n'essaya pas de se relever. De toute façon, il ne restait que quelques secondes, une minute tout au plus avant que l'artefact ne se désactive. Le décompte terminé, Nagi aida son fils à se relever, tout en discutant avec lui. Nagi supposait qu'il était mort … mais que c'est joyeux comme pensée !

     

    - Attends ! Tu n'es pas mort ! s'exclama Negi. Il y a six ans, un jour où il neigeait, tu m'as sauvé !

     

    Soudain, Evangeline fit irruption sur le ring. Elle fit remarquer au magicien qu'il n'était pas venu lever sa malédiction … en fait il avait complètement oublié ce sort qu'il avait jeté.

    Il ne restait qu'à peine quelques secondes …

     

    - Nagi, serre-moi dans tes bras … demanda la magicienne immortelle.

    - Non, répondit-il instantanément.

     

    Faute de mieux, il posa affectueusement – enfin à peu près – sa main sur la tête de la vampire. Une colonne de lumière commençait à l'envelopper. Bientôt, Kuneru réapparaîtrait … Nagi s'adressa à son fils, profitant de ces précieuses secondes. Accrochez-vous … il dit qu'il comprenait cette admiration envers le jeune homme brillant et invicible, le héros sublime, etc la liste est longue … mais qu'il était mieux d'arrêter de le chercher comme ça.

     

    - L'important, c'est d'être toi-même, conclut Nagi.

     

    La colonne de lumière s'intensifia. Le magicien se tourna vers Lya.

     

    - Tu as bien grandis, Lya. Tu sais, je suis sûr que tes parents sont encore en vie. Ces deux têtes de mules sont tenaces, s'exclama-t-il en riant, tandis que l'éclat s'amplifiait jusqu'à le cacher.

    - Nagi !!! cria la jeune magicienne, des larmes coulant à nouveau sur ses joues.

     

    Il avait disparu … Il était parti … Mais pourquoi Lya pleurait-elle ? Pour Negi ? Par compassion ? Non. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle tenait à Nagi. Elle le connaissait à peine. Pourtant, son départ laissait un grand vide en elle. Les larmes coulaient d'elle-même, comme pour Negi, et la jeune fille éprouvait la même chose que dans son rêve. Et elle se sentait seule.

    Une main se posa sur son épaule. C'est vrai … même si Yoru n'était pas avec elle comme lors du combat de Negi et M. Takahata, Kaede était encore là … et les autres aussi. Elle n'avait pas à se sentir seule, malgré la disparition de Nagi. De plus, elle ne pouvait rien faire pour le revoir, et celui qu'elle avait vu n'était qu'une copie …

    Chao, l'organisatrice du tournoi, apparut derrière Kazumi pour la remise des prix. Ce tournoi était sur le point de se terminer. Ne restait qu'un discours de la chinoise et la remise en elle-même. Elle commença par rappeler la haute tenue des matchs précédents, et vanta le vainqueur. Puis elle aborda le sujet sensible : Combats réels ou effets spéciaux ? Lya crut un moment que son amie en raconterait trop, mais Chao laissa le public seul juge.

    Un petit podium fut installé. Kaede et Setsuna montèrent sur la troisième marche, en tant que demi-finalistes. Negi, prit la deuxième position, ayant été en finale. Puis vint Kuneru, le vainqueur, qui se posta sur la marche la plus haute.

    Comme on pouvait s'y attendre, la moitié des journalistes de Mahora se rua vers Kuneru, les explosions magiques les ayant attirés au tournoi. L'ami de Nagi se dématérialisa pour éviter les interviews. À défaut de pouvoir l'interroger, ils prirent Negi, finaliste, pour cible. Lequel s'échappa en un quick move grâce à Kazumi. Les reporters devaient être déçus ! Kaede et Setsuna s'éclipsèrent aussi, risquant fortement de se voir répondre à des questions pendant une demie-heure. Pas toujours très réjouissant, comme programme. Dommage pour les journalistes, ils n'allaient pas pouvoir interviewer beaucoup de monde : Chao et Kazumi n'étaient pas restées non plus. D'ailleurs, la plupart des combattants étaient déjà partis.

    Lya, elle aussi, avait peut-être intérêt à partir. Sa réaction envers Nagi n'était pas passée inaperçue pour tout le monde … Elle prévint Yoru et s'esquiva vers le dortoir pour se changer, après la douche involontaire qu'elle venait de prendre à cause de Nagi.

    Elle fouilla dans son armoire. Elle opta pour une robe bleu clair à bretelles, toute simple, qui descendait jusqu'à ses genoux. Sa taille était entourée par une ceinture blanche qui se terminait par un petit nœud.

    Puis Lya jeta un coup d’œil dans la chambre, vérifiant qu'elle n'oubliait rien. Et là, malédiction ! Au centre de la pièce, il y avait une table. Sur la table, bien en évidence, était posé un petit objet. Celui que lui avait fourni le directeur de Mahora. Le détecteur à révélations ! Elle avait encore une ronde à faire … maintenant, la magicienne savait ce qu'elle ferait dans l'après-midi, après manger …

    Il était pratiquement midi, alors elle se dirigea sans se presser jusqu'à un restaurant, en passant par quelques stands. La collégienne en trouva un pas trop cher, et réussit à trouver une des dernières tables qui restaient. Très consciencieusement, elle prit tout son temps pour manger, essayant de retarder l'inéluctable – marcher sur la même place pendant trois heures pour arrêter des confessions – même si ça ne servait à rien. Mais bon, cette tâche était d'un ennui …

    M'enfin, quand faut y aller, faut y aller … Lya paya l'addition, puis sortit de la brasserie et se rendit à la place de l'Arbre-Monde.

    Bien sûr, elle restait attentive aux sonneries du petit détecteur, mais elle profita de sa ronde pour observer le festival. Les gens se déguisaient, on retrouvait dans la foule, les stands et sur les bâtiments toutes les nuances de couleurs possibles. De nombreuses inventions des clubs de technologies sillonnaient les rues, guidées par leurs créateurs. Renfermée comme elle l'avait été dans ses premières années – du moins celles dont elle se souvenait – Lya n'avait jamais été à un festival de cette ampleur. Elle avait hâte de le visiter, une fois sa ronde terminée !

    Ses pensées furent interrompues par un bip sonore. Lya suivit rapidement le petit appareil qui l'emmenait vers le couple en question. Deux lycéens, en marge de la foule, discutaient, la fille se montrant légèrement tendue.

     

    - Franchement, marmonna la magicienne, ils n'auraient pas pu se mettre deux mètres à droite ?

     

    En effet, ils étaient juste à la limite de la place, ce qui rendait les choses tout de même plus faciles. Elle réfléchissait au moyen de les pousser en dehors de la zone quand un petit cri de protestation lui fit tourner la tête. Un petit garçon courait après un chien, dont il avait sûrement lâché la laisse, et essayait de le rattraper, en vain. L'animal courrait vers une toute petite rue qui sortait de la zone et où il n'y avait personne, non loin des deux lycéens. « Parfaitement ce dont j'ai besoin », pensa Lya, même si c'était une idée plutôt … enfin … très tordue. Grâce à une magie de lévitation discrète, elle poussa le chien pour qu'il dépasse le couple. Voyant que le garçon n'arrivait pas à rattraper son animal, le lycéen le poursuivit et rattrapa la laisse. L'étudiante le rejoignit avec l'enfant, en dehors du secteur sous l'influence de l'Abre-Monde. Une confession de moins sur les bras.

    Elle en était à une demie-heure de ronde sur les trois qu'elle était sensée faire quand quelqu'un l'interpella. Illonya la rejoignait en courant. Ah, elle aussi devait faire sa ronde. Et, accessoirement, devait s'ennuyer.

     

    - Tu trouves ça barbant, toi aussi ? demanda Illonya.

    - Non, alors tu vois je trouve ça super intéressant ! plaisanta Lya. Franchement, j'ai hâte de finir mes trois heures.

    - T'as tout ça à faire ? Je croyais qu'une petite heure suffisait !

    - Ha ha … Negi est trop occupé alors je fais des heures sup' pour le remplacer, soupira la collégienne.

     

    Les deux magiciennes continuèrent la ronde ensembles, et très vite celle-ci devint plus agréable. Ce temps passé ensembles permit à Lya de connaître la stagiaire plus en profondeur. Illonya Olsen était diplômée d'une école de magie réputée de Norvège, et effectuait son stage à Merdiana, où Negi avait tout appris. Elle avait rencontré son familier, la chatte-fée Shelly, lorsqu'elle était très jeune, et maîtrisait comme éléments l'eau et le feu. La norvégienne pouvait se montrer espiègle – comme lors du tournoi – ou respectueuse selon les situations, mais depuis son arrivée au Japon, elle était une colocataire sympathique.

     

    - Au fait, d'habitude, je te vois avec Shelly. Où est-elle ?

    - Bah, elle doit dormir dans la chambre. Un chat-fée reste un chat, répondit-elle avec un petit sourire.

     

    Elles empêchèrent encore deux, trois confessions puis visitèrent le festival ensembles. Lya se surprit à penser que les trois heures étaient passées bien plus vite que la veille. Il était dix-sept heures et elle disposait de deux heures avant la parade, qu'elle avait prévu de regarder avec Yoru.

    Les deux filles allèrent voir plusieurs élèves de la 3-A qui tenaient des stands ou faisaient des animations. Par exemple, Akira s'occupait d'un stand de Takoyaki, des boulettes de poulpe. Haruna faisait le portrait de ses clients et Ayaka faisait avec d'autres élèves des démonstrations d'équitation.

    Lya, pour finir, emmena son amie à la maison hantée de sa classe. La collégienne, même si elle connaissait les trois parcours, entra en tant que cliente. D'ailleurs, les 3-A qui tenaient l'attraction réussirent à lui faire quelques frayeurs. Illonya était aussi assez impressionnable et trouva la maison hantée très réussit. Évidemment, elle venait de se casser la figure sur une très bonne imitation du directeur étalée en plein milieu du chemin. En ayant au préalable rencontré des filles qui s'investissaient à fond dans leur rôle de morts vivants. Ah, et aussi Sayo, le fantôme de la classe, qui était apparue juste devant la stagiaire en traversant un mur. Alors, évidemment, elle avait de quoi être surprise.

     

    - Heureusement qu'elle est réussie, cette maison hantée, plaisanta Lya, parce qu'on y a sacrifié deux nuits !

     

    Les deux magiciennes se séparèrent devant la fontaine d'une place de Mahora, où Lya devait retrouver Yoru. Celui-ci ne tarda pas à arriver, à dix-neuf heures tapantes. Lorsqu'il vit la jeune fille, il ne put s'empêcher de s'arrêter pour la dévisager. L'adolescent la trouvait très jolie, avec sa robe bleue sur laquelle seule la ceinture blanche tranchait, ses cheveux blonds d'où sortaient deux mèches descendant jusqu'à ses genoux, et ses yeux si particuliers, l'un bleu et l'autre gris. Il aimait aussi son sourire, sourire qui avait malheureusement laissé la place à des pleurs lors du tournoi.

    Voyant que Yoru s'était arrêté, Ce fut Lya qui le rejoignit. Le collégien semblait être dans la lune, mais il se reprit vite. Il la guida jusqu'à une place légèrement surélevée, d'où la parade était plus visible. Celle-ci n'avait pas encore débuté, mais le défilé n'allait certainement pas tardé. En attendant, ils discutaient tranquillement de tout et de rien, de leurs impressions sur le festival, mais aussi de Chao. Le directeur était persuadé que quelque chose allait bouger cette année, et que Chao aurait un lien avec tout ça. Et pourtant, au soir du deuxième jour du festival, rien ne s'était passé.

     

    - Ça commence, annonça Yoru.

     

    La parade débuta, sous les acclamations des spectateurs. Tout était haut en couleurs. Un cortège de grands chars décorés avec une grande imagination avançait lentement, avec dessus des danseuses et des animateurs. On retrouvait toutes les formes, tous les robots qui parcourraient les rues depuis le matin.

    Encore une fois, Lya se mit à penser à l'impressionnant contraste entre son ancienne vie et celle à Mahora. À l'image de cette parade, sa vie au campus était dynamique et joyeuse. De plus, maintenant qu'elle maîtrisait sa magie, elle ne faisait plus peur aux gens. Ce qui lui faisait penser que finalement, tous les évènements magiques qui s'étaient produits autour d'elle ne venaient que d'elle, contrairement à ce qu'elle croyait avant.

    La parade défilait toujours sous leurs yeux, sur une musique et une ambiance de fête. Bientôt, elle disparaîtrait de leur champs de vision, en tournant dans une autre rue. Lya fut tentée de la suivre, mais Yoru semblait avoir autre chose en tête.

     

    - Viens, j'ai quelque chose à te montrer, déclara-t-il, les yeux étrangement baissés.

     

    Lya le suivit de bon cœur, impatiente de découvrir autre chose. Elle n'allait pas être déçue … L'adolescent la guida à travers la foule compacte. Très vite, les rues se trouvèrent moins bondées et rétrécirent.

    Yoru la conduisit en marge de la ville, loin du centre et de toute l'agitation. Ils arrivèrent devant une petite colline qu'ils gravirent rapidement.

     

    - C'est magnifique, s'extasia Lya dans un souffle.

     

    De leur perchoir, les deux adolescents pouvaient voir une grosse partie de Mahora, surmontée par l'Arbre-Monde. Toutes les lumières des réverbères et de la parade ressemblaient à des petites flammes vacillantes de bougie qui éclairaient les rues. L'île-bibliothèque était elle aussi illuminée, et sa silhouette se détachait dans la nuit. Ils étaient au calme, avec une superbe vue sur la ville.

    Lya observa un moment son ami, un peu en retrait. Il ne disait rien, regardant au sol et rougissant légèrement pour une raison tout à fait inexplicable. Ce comportement ne correspondait pas au Yoru qu'elle connaissait.

    Puis le collégien leva la tête, et hésita un moment.

     

    - Lya, commença-t-il enfin, je …

    - Oui ? fit-elle, ne se doutant de rien.

    - Euh … merci d'avoir accepté de voir la parade avec moi.

    - Eh bien de rien, répondit la jeune fille qui ne voyait pas où il voulait en venir.

     

    L'adolescent semblait vouloir lui dire quelque chose, mais elle ne savait pas quoi. Elle n'avait d'autre choix que d'attendre qu'il se lance, parce qu'elle n'en avait aucune idée.

     

    - Ça va peut-être te paraître bizarre, mais …

    - Mais ?

    - Tout à l'heure, au tournoi … tu semblais triste … je n'aime pas quand tu pleures. Je préfère une Lya souriante et heureuse …

    - Euh, ça tombe bien, moi aussi.

     

    Alors là, ça y était, Lya était perdue. Mais qu'est-ce qu'il voulait dire, enfin ?

     

    - J'aimerais d'aider, continua Yoru.

    - Ah oui ? Euh, merci.

    - Ce que j'essaie de te dire, c'est que …

    - Oui ?

    - En fait …

    - Oui ?

    - Je me suis aperçu que …

    - Oui ?

    - Je t'aime.

    - Oui ? … … quoi ?

     

    Alors là, elle n'en revenait pas. Pas du tout. Du tout du tout. Elle ne savait absolument pas quoi dire. Pourtant, elle aurait dû s'en douter, mais bon elle n'avait aucune connaissance en ce genre de choses. En fait, elle ne savait même pas ce qu'elle ressentait elle-même, ni pour qui. Elle était légèrement … comment dire … perdue.


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